"La haute flamme du pur amour..."
Non, il ne s'agit pas aujourd'hui de Marion Maréchal-Le Pen. Deux citations de Bernanos, la première issue du début de La France contre les robots :
La révolution "que nous annonçons se fera contre le système actuel tout entier, ou ne se fera pas. Si nous pensions que ce système est capable de se réformer, qu'il peut rompre de lui-même le cours de sa fatale évolution vers la Dictature - la Dictature de l'argent, de la race, de la classe ou de la Nation -, nous nous refuserions certainement à courir le risque d'une explosion capable de détruire des choses précieuses qui ne se reconstruiront qu'avec beaucoup de temps, de persévérance, de désintéressement et d'amour. Mais le système ne changera pas le cours de son évolution, pour la bonne raison qu'il n'évolue déjà plus ; il s'organise seulement en vue de durer encore un moment, de survivre. Loin de prétendre résoudre ses propres contradictions, d'ailleurs probablement insolubles, il paraît de plus en plus disposé à les imposer par la force, grâce à une réglementation chaque jour plus minutieuse et plus stricte des activités particulières, faite au nom d'une espèce de socialisme d'État, forme démocratique de la dictature."
Toute ressemblance, etc. La seconde est la suite du texte sur Bloy et la pauvreté que je vous livre par extraits (non coupés) de temps en temps :
"Cette société ne veut pas de pauvres, et il serait vraiment trop niais de croire que ce soit par sensibilité de coeur ou même d'entrailles, car nous la regardons agir, nous faisons le compte de ses charniers, de ses prisons, de ses camps de torture, de ses laboratoires de mort, et nous savons parfaitement que si l'Histoire nous en présente peut-être d'aussi féroces qu'elle, du moins n'en a-t-on jamais connu d'aussi volontaire et d'aussi lucide dans la férocité. La Société moderne ne veut pas de pauvres pour la même raison qu'elle ne voudrait pas de nobles, s'il lui restait assez d'honneur ou seulement de prestige pour faire des nobles. Elle ne peut comprendre que la pauvreté est aussi une libération [note de AMG : elle fait tout pour que ce ne soit plus une libération], que le sort de la liberté des hommes est mystérieusement lié dans ce monde à celui de la pauvreté [note de AMG : elle le comprend, justement, c'est pour ça qu'elle fait en sorte que ce ne soit plus une libération, que la misère remplace la pauvreté]. La Pauvreté fait des hommes libres, d'une certaine liberté innocente qui n'est évidemment pas celle des saints, c'est-à-dire des pauvres en esprit, des pauvres volontaires, des victimes volontaires de la pauvreté, mais qui suffit à entretenir parmi nous le feu couvant sous la cendre où, de génération en génération, s'élève tout à coup la haute flamme du pur amour. Car la liberté du saint n'est sans doute pas autre chose que la liberté du pauvre entièrement surnaturalisée, comme le fer dans la forge qui du rouge sombre passe au blanc."
La révolution "que nous annonçons se fera contre le système actuel tout entier, ou ne se fera pas. Si nous pensions que ce système est capable de se réformer, qu'il peut rompre de lui-même le cours de sa fatale évolution vers la Dictature - la Dictature de l'argent, de la race, de la classe ou de la Nation -, nous nous refuserions certainement à courir le risque d'une explosion capable de détruire des choses précieuses qui ne se reconstruiront qu'avec beaucoup de temps, de persévérance, de désintéressement et d'amour. Mais le système ne changera pas le cours de son évolution, pour la bonne raison qu'il n'évolue déjà plus ; il s'organise seulement en vue de durer encore un moment, de survivre. Loin de prétendre résoudre ses propres contradictions, d'ailleurs probablement insolubles, il paraît de plus en plus disposé à les imposer par la force, grâce à une réglementation chaque jour plus minutieuse et plus stricte des activités particulières, faite au nom d'une espèce de socialisme d'État, forme démocratique de la dictature."
Toute ressemblance, etc. La seconde est la suite du texte sur Bloy et la pauvreté que je vous livre par extraits (non coupés) de temps en temps :
"Cette société ne veut pas de pauvres, et il serait vraiment trop niais de croire que ce soit par sensibilité de coeur ou même d'entrailles, car nous la regardons agir, nous faisons le compte de ses charniers, de ses prisons, de ses camps de torture, de ses laboratoires de mort, et nous savons parfaitement que si l'Histoire nous en présente peut-être d'aussi féroces qu'elle, du moins n'en a-t-on jamais connu d'aussi volontaire et d'aussi lucide dans la férocité. La Société moderne ne veut pas de pauvres pour la même raison qu'elle ne voudrait pas de nobles, s'il lui restait assez d'honneur ou seulement de prestige pour faire des nobles. Elle ne peut comprendre que la pauvreté est aussi une libération [note de AMG : elle fait tout pour que ce ne soit plus une libération], que le sort de la liberté des hommes est mystérieusement lié dans ce monde à celui de la pauvreté [note de AMG : elle le comprend, justement, c'est pour ça qu'elle fait en sorte que ce ne soit plus une libération, que la misère remplace la pauvreté]. La Pauvreté fait des hommes libres, d'une certaine liberté innocente qui n'est évidemment pas celle des saints, c'est-à-dire des pauvres en esprit, des pauvres volontaires, des victimes volontaires de la pauvreté, mais qui suffit à entretenir parmi nous le feu couvant sous la cendre où, de génération en génération, s'élève tout à coup la haute flamme du pur amour. Car la liberté du saint n'est sans doute pas autre chose que la liberté du pauvre entièrement surnaturalisée, comme le fer dans la forge qui du rouge sombre passe au blanc."
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