Devenir-nombre...
Poursuivons notre série de citations de P. Muray, qui, la relecture de son 19e siècle à travers les âges se poursuivant en parallèle, me permet de bâtir petit à petit une démonstration, si ce n'est sur la nature du macronisme, lequel ne fait que débuter, du moins sur certains de ses aspects les plus frappants, certains de ses aspects les plus connus parce que les moins nouveaux - du moins si l'on a les bonnes clés, et j'ai justement le sentiment que Muray nous en donne.
Les quelques phrases que voici suivent immédiatement le texte sur le bon Docteur-Assassin-Vaccinateur-Égalitariste (il y eut Philippe-Égalité, mais Guillotin-Égalité, c'est plus adapté, et d'ailleurs Philippe Régicide Égalité fut guillotiné, même avec son surnom franc-maçon sa tête de frère de monarque dépassait) Guillotin :
"Il faut lier le triomphe du vouloir-guérir comme vision du monde aux progrès de la médecine. Face à la galopade démographique dont je parlerai un peu plus loin, l'événement peut-être le plus important de l'ère. Le plus gros, donc caché par tous les écrans possibles : 190 millions d'Européens en 1800, 400 millions en 1900. Au fond, il ne s'est passé que ça, et tout ce qui s'est quand même passé vient de là. (…) Vouloir-guérir. Vouloir s'accroître. Devenir-nombre. Croire déceler sa fin dans le nombre. Toutes les sociétés avant nous ont dû trembler d'en arriver là où nous sommes, dans le multiple déchaîné par lui-même et pour lui-même. D'où leurs rites, interdits, cérémonies, sacrifices, espaces sacrés, cartographies compliquées pas du tout absurdes ou aliénées ou mystifiées comme on a cru pouvoir l'affirmer. Averties au contraire intimement. Multipliant les barrières et les obstacles et les faux obstacles. Pour éviter, pour retarder les désastres consécutifs au remembrement général. A l'indifférenciation déferlante…"
Comme d'une part P. Muray (qui est un peu trop sous influence "sollersienne" dans son style à cette époque, vous l'aurez noté) n'est pas toujours pleinement clair (mes coupures y étant à l'occasion pour quelque chose), comme d'autre part son optique et la mienne ne se confondent pas strictement, j'ajoute la clarification suivante. Il y a le nombre et la nature du nombre. Le fait que la population européenne ait brusquement doublé en un siècle, ce n'est qu'un chiffre. Mais cela a frappé, de façon plus ou moins consciente, les générations concernées, et a généré des modes de pensée - nous sommes au début de l'ère des masses. Il y a les chiffres, et les façons dont ces chiffres sont ressentis, soit du point de vue des gouvernants, soit de celui des gens qui constituent maintenant des masses - le « soit » ne signifiant pas ici que les gouvernants et les masses soient forcément en désaccord. Le nombre n'est pas tout, mais il y a des effets de seuil liés au nombre. - Enfin, en sous-texte, il y a la question du malthusianisme - celui-ci est bien sûr une réponse aux croissances numériques de population. Qu'il soit la seule ou la meilleure, c'est loin d'être prouvé.
Au plaisir !
Les quelques phrases que voici suivent immédiatement le texte sur le bon Docteur-Assassin-Vaccinateur-Égalitariste (il y eut Philippe-Égalité, mais Guillotin-Égalité, c'est plus adapté, et d'ailleurs Philippe Régicide Égalité fut guillotiné, même avec son surnom franc-maçon sa tête de frère de monarque dépassait) Guillotin :
"Il faut lier le triomphe du vouloir-guérir comme vision du monde aux progrès de la médecine. Face à la galopade démographique dont je parlerai un peu plus loin, l'événement peut-être le plus important de l'ère. Le plus gros, donc caché par tous les écrans possibles : 190 millions d'Européens en 1800, 400 millions en 1900. Au fond, il ne s'est passé que ça, et tout ce qui s'est quand même passé vient de là. (…) Vouloir-guérir. Vouloir s'accroître. Devenir-nombre. Croire déceler sa fin dans le nombre. Toutes les sociétés avant nous ont dû trembler d'en arriver là où nous sommes, dans le multiple déchaîné par lui-même et pour lui-même. D'où leurs rites, interdits, cérémonies, sacrifices, espaces sacrés, cartographies compliquées pas du tout absurdes ou aliénées ou mystifiées comme on a cru pouvoir l'affirmer. Averties au contraire intimement. Multipliant les barrières et les obstacles et les faux obstacles. Pour éviter, pour retarder les désastres consécutifs au remembrement général. A l'indifférenciation déferlante…"
Comme d'une part P. Muray (qui est un peu trop sous influence "sollersienne" dans son style à cette époque, vous l'aurez noté) n'est pas toujours pleinement clair (mes coupures y étant à l'occasion pour quelque chose), comme d'autre part son optique et la mienne ne se confondent pas strictement, j'ajoute la clarification suivante. Il y a le nombre et la nature du nombre. Le fait que la population européenne ait brusquement doublé en un siècle, ce n'est qu'un chiffre. Mais cela a frappé, de façon plus ou moins consciente, les générations concernées, et a généré des modes de pensée - nous sommes au début de l'ère des masses. Il y a les chiffres, et les façons dont ces chiffres sont ressentis, soit du point de vue des gouvernants, soit de celui des gens qui constituent maintenant des masses - le « soit » ne signifiant pas ici que les gouvernants et les masses soient forcément en désaccord. Le nombre n'est pas tout, mais il y a des effets de seuil liés au nombre. - Enfin, en sous-texte, il y a la question du malthusianisme - celui-ci est bien sûr une réponse aux croissances numériques de population. Qu'il soit la seule ou la meilleure, c'est loin d'être prouvé.
Au plaisir !
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