Un gigantesque effort...
Je tire deux citations du dernier numéro de L’Incorrect.
Jean-François Chemain, sur la France laïque républicaine et la France monarchiste chrétienne :
"Elles sont deux branches sorties d’un même tronc : la France chrétienne. Les débats qui l’agitent viennent de loin, on y retrouve de vieilles querelles, comme le pélagianisme, le gallicanisme, l’absolutisme politique ou le jansénisme. Un laïcard de gauche n’est à mes yeux qu’un curé gallican adepte de l’augustinisme politique, c’est-à-dire quelqu’un qui pense que l’État est là pour faire appliquer, mieux que l’Église, les principes évangéliques. D’où le fait qu’il tape sur l’Église, en tant qu’elle fait concurrence à l’État, tout en nous gavant de leçons de morale. Le prototype de l’homme de gauche, c’est le curé défroqué… La Révolution en était pleine, comme le PCF des années 60."
Ce mélange des genres (au lieu de "rendre à César…, et de rendre à Dieu…") permettant par ailleurs de reprocher à la fois à l’Église sa dureté et son laxisme, selon que ce soit le défroqué mal à l’aise avec lui-même, ou le politique qui se mêle de moeurs et de conscience, qui s’exprime.
La deuxième citation vient d’un article de Vincent Coussedière. Je n’ai pas le numéro 1 avec moi, et ne peux pas vérifier s’il était l’auteur d’un des bons articles du premier numéro, sur l’impossibilité d’un gramscisme de droite. Quoi qu’il en soit de ce point, voici la citation, qui elle-même cite un bon auteur :
"Les tentatives actuellement à la mode de refondation idéologique de la droite nous semblent… vouées à l’échec. Et c’est tant mieux. Tout simplement parce que ce qui fonde la « droite », si tant est qu’elle existe, n’est pas l’idéologie, mais la résistance à l’idéologie. Baudrillard disait du masculin qu’il était un gigantesque effort pour sortir du féminin. On pourrait dire de la droite qu’elle est un gigantesque effort pour sortir de la tentation idéologique de la gauche…"
Ce qui rejoint l’idée souvent exprimée ici, parfois, depuis que j’ai pris connaissance de ses livres, par l’intermédiaire de Jean Madiran : la droite est une création de la gauche ; il est donc moins important de savoir ce que peut être « être de droite » (même si cela aboutit à des idées intéressantes), que de refuser d’être de gauche (même si cela ne signifie pas qu’il faille rejeter tout ce qui vient des diverses (de moins en moins) composantes de la gauche). Très simplement : la gauche refuse le péché originel et la liberté-pour-les-ennemis-de-la-liberté, il faut déjà n’avoir moralement et intellectuellement rien à faire avec de pareils refus. Ce ne serait déjà pas rien, et vaudrait bien trois "refus" dans le même paragraphe.
(Quant à la magnifique réflexion de Baudrillard, d’inspiration chrétienne (judéo-chrétienne, pour le coup ?) et freudienne, si quelqu’un a la référence…)
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