dimanche 13 mai 2018

L’automne vient d’arriver…

Je reviens périodiquement sur une idée que je trouve trop peu souvent exprimée lorsqu’il s’agit d’analyser les mutations de la France depuis 1945 : la disparition de la paysannerie. La France a été pendant des siècles un pays rural avant tout (avec une relation complexe et productive à sa capitale), ce n’est plus le cas depuis quelques décennies. Ce changement - qui a commencé à s’opérer avant l’immigration de main-d’oeuvre, le regroupement familial, l’immigration massive, le Grand Remplacement… - est d’une grande importance pour la structure générale de la France et la mentalité des Français. Marx maudissait les paysans français qui ne s’intéressaient pas aux révolutions, Chesterton les encensait pour leur bon sens d’esprit chrétien. 

Et voici que je tombe à deux jours d’intervalle sur ces deux phrases, d’auteurs pour le moins différents. Jean Clair d’abord, en quatrième de couverture des Derniers jours (2013) : 

"J’appartiens à un peuple disparu. A ma naissance, il constituait près de 60% de la population française. Aujourd’hui, il n’en fait pas même 2%. 

Il faudra bien un jour reconnaître que l’événement majeur du XXe siècle n’aura pas été l’arrivée du prolétariat, mais la disparition de la paysannerie."

Léon Daudet ensuite, mais un siècle avant (1922), dressant le bilan du XIXe : 

"En dehors du parlement bourgeois, et où dominent les avocats (c’est-à-dire où est assurée la prédominance des mots sur les choses), en dehors du tâtonnement syndicaliste des ouvriers et des employés, quelle est donc la force, obscure mais résistante, qui a maintenu la nation française et l’a empêchée de se dissoudre révolutionnairement, en cent trente ans ? C’est bien simple : c’est la paysannerie. On peut considérer qu’en paix comme en guerre, le paysan français, non contaminé par la stupidité des « novations » ambiantes, échappant à l’effritement social par le sol a, de 1789 à 1914, sauvé le pays. Il a maintenu le conglomérat. Il a alimenté la bourgeoisie, versé en elle, à chaque génération, des éléments physiquement et moralement sains, laborieux, parfois généreux, toujours originaux et puissants. Son épargne intellectuelle et morale a rendu plus de services encore que son épargne monétaire."

 - Et maintenant, alcoolique et finalement endetté, « périphérique » en son pays même, comme un ongle sale que l’on va couper, il peut crever et laisser la place. 


Nos gouvernants y veillent. - Et nos gouvernants, contrairement à ce que l’on lit trop souvent, en politique intérieure en tout cas, réussissent ce qu’ils veulent réussir et ratent ce qu’ils ne veulent pas réussir.