Des pirouettes de l'amour-propre.
Il n'est pas interdit de trouver dans cette tirade d’un personnage de L’Idiot quelques échos de problématiques d’une part contemporaines, d’autres part éternelles :
"Nastassia Philipovna est terriblement irritable, soupçonneuse et égoïste. Elle a l’âme d’un fonctionnaire privé d’avancement. Elle avait envie de se montrer et d’exhaler tout son mépris pour les miens… et pour moi ; c’est exact, je ne le nie pas…, et malgré cela, elle m’épousera. Vous n’avez pas idée des pirouettes dont l’amour-propre humain est capable. Ainsi cette femme me tient pour un être méprisable parce que, sachant qu’elle est la maîtresse d’un autre, je ne fais pas mystère que je l’épouse pour son argent. Et elle ne se doute pas qu’un autre agirait envers elle avec encore plus de bassesse : il s’accrocherait à elle, lui ferait de belles phrases sur le progrès et l’émancipation et se servirait de la question féminine pour la mener par le bout du nez. Il ferait croire (avec quelle facilité) à cette vaniteuse pécore qu’il ne l’épouse que pour sa « noblesse de coeur » et pour son « infortune », alors qu’en réalité il n’en aurait qu’après son argent. Si je lui déplais, c’est que je me refuse à faire des simagrées ; avec elle, c’est ce qu’il faudrait."
- Bien évidemment, ce que dit ici Gania sur lui-même n’est pas nécessairement vrai. C’est le côté rohmérien de Dostoïevski… La paille et la poutre, dans des milieux et des contextes différents.
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