"Le combat pour la vie, le respect de la mort, la protection de chacun..."
Je viens de relire la déclaration de M. Macron concernant Vincent Lambert, un extrait sera notre citation du jour :
"Derrière les déchirements, j’entends une angoisse : celle qu’en France, on puisse décider de manière arbitraire de la mort d’un citoyen. C’est précisément parce que ce n’est pas le cas, parce qu’il n’y a pas, dans notre pays, de place pour l’arbitraire, que je n’ai pas à m’immiscer dans la décision de soin et de droit qui a été prise dans le cas de Vincent Lambert. Juste à réaffirmer les principes fondamentaux qui tiennent notre Nation et prévalent sur toute autre considération : le combat pour la vie, le respect de la mort, la protection de chacun."
C’est du Jarry, du Ionesco, du Tardieu, je ne sais plus. Invoquer le combat pour la vie - qui prévaut sur toute autre considération… - pour justifier une mise à mort, il fallait oser. Quant au refus en soi louable de l’arbitraire - il n’y a pas dans notre pays de place pour l’arbitraire : les gilets jaunes envoyés en prison plus rapidement que les racailles de banlieue apprécieront… -, on pourrait comprendre l’argument s’il n’était pas typique de la République manoeuvrière, justement, d’être de plus en plus sophistiquée dans l’arbitraire, de toujours trouver une justification juridique à ce qui l’arrange, a posteriori et au mépris du principe de non-rétroactivité des lois si besoin est. Il faut traduire ainsi les propos de M. Macron : "C’est précisément parce qu’il y a dans notre pays beaucoup de place pour l’arbitraire que dans ce dossier je décide arbitrairement (pas tout à fait, j’y reviens après) de ne pas faire ce que je ferais dans d’autres cas, je décide de rester à ma place et de laisser les autorités compétentes tuer Vincent Lambert."
Il est tout à fait compréhensible et humain que des gens qui aiment Vincent Lambert ou des personnes dans une situation comparable pensent qu’une telle souffrance, pendant des années, n’en vaut pas la peine - même s’il faut tout de même rappeler à tous ceux qui ont un avis sur le sujet, et si j’en crois ce que j’ai lu aujourd’hui, cela fait du monde, que seul Vincent Lambert sait ce que Vincent Lambert éprouve, seul le Vincent Lambert d’aujourd’hui sait ce que le Vincent Lambert d’aujourd’hui pense de cette question. Ce qui est moins compréhensible et beaucoup moins humain, c’est l’insistance de certains à vouloir faire mourir Vincent Lambert. Je ne prétends pas que cela résolve toute la question, je sais bien que l’on pourra toujours me reprocher de généraliser à partir d’un seul exemple, mais le fait qu’un compte Twitter aussi emblématique de la propagande LGBT que @Parispasrose se mêle avec constance d’une question dont on pourrait penser qu’elle n’a pas grand rapport avec l’homophobie (et les LGBT ont aussi le plus souvent un avis tranché comme une guillotine sur l’avortement, alors que s’il y a une question qui ne concerne pas les homosexuels, c’est bien celle-là) suggère assez nettement qu’il s’agit ici d’un affrontement entre deux visions de la vie (c'est de ce point de vue qu'il n'est pas arbitraire que M. Macron ait pris la décision de ne pas prendre de décision qui l'engage personnellement). Aux catholiques il n’est certes pas besoin de l’expliquer ; d’autres peuvent voir et comprendre, dans des crises comme celle d’hier, qu’il est tout de même quelque peu cocasse, si le mot convient à la situation, que des gens qui veulent toujours protéger les minorités, les animaux, la planète, etc., s’acharnent autant à demander la mort de quelqu’un. Ils peuvent voir, ils peuvent y réfléchir, ils peuvent peut-être du coup prendre du recul par rapport à certaines propagandes soi-disant généreuses.
Je ne demande que ça. Mais il faut bien regarder la question en face : si la défense de la vie de Vincent Lambert veut dire quelque chose, cette défense implique d’assumer qu’il doive rester en vie même s’il souffre atrocement jusqu’à sa mort. Je ne prétends aucunement que les catholiques partisans de la vie veuillent qu’il souffre, puisqu’ils sont les premiers à demander pour Vincent Lambert des soins palliatifs, mais on ne peut tourner ici autour du pot. Dans le cas de l’avortement, peut se produire le cas de la mise en danger de la vie de la mère par l’enfant, il peut y avoir différentes manières d'appliquer le même principe ; dans le cas de l’euthanasie, une seule personne est en jeu, il ne peut pas y avoir d’exception au principe, si l’on accepte qu’un trop-plein de souffrance puisse justifier la mise à mort, on ouvre tout grand la porte. Et quand on sait que des personnes atteintes d’une longue maladie, laquelle a parfois pour seul nom la vieillesse, rêvent d’en finir, ou sont soulagées quand la fin arrive, il est bien évident qu’il est dur de décréter que ceux qui sont dans un état analogue à celui de Vincent Lambert doivent coûte que coûte rester en vie. Au moins voit-on, je l’espère, la différence avec l’arbitraire !
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