samedi 12 août 2017

Michel Onfray bat le record mondial de conneries au paragraphe.

Éléments toujours, cet homme bien sûr de lui y explique en quoi son matérialisme inspiré de Lucrèce met à bas l'ignoble christianisme. Ça dure une colonne entière de bêtises, contresens, généralisations abusives et intempestives, je cite dans son intégralité le passage le plus dense en absurdités :

"Quatrième leçon : l'hédonisme. Le souverain bien n'est pas dans l'imitation de la passion du Christ et le désir de la mort, ce qui génère masochisme et névrose, goût de la souffrance et plaisir pris au cadavre, mais dans le plaisir pris à vivre sa vie. Parmi les plaisirs : la frugalité, autrement dit une vie simple débarrassée de la consommation ou de l'accumulation, du luxe ou du superfétatoire. Mais aussi l'amitié à laquelle je donne une place importante. Elle est le sentiment électif et aristocratique païen qui permet de combattre la fiction chrétienne d'un amour du prochain universel pour réaliser son salut."

Deux intellectuels assis vont moins loin qu'un con qui marche, mais un intellectuel con qui bat la campagne, ça va loin. Dois-je répondre, sachant que l'intéressé insiste  - sans complètement convaincre… - sur le fait qu'il se moque bien de ce qu'on dit de lui ? Très brièvement :

 - il n'y a pas de « désir de la mort »  dans le christianisme. Il est précisé depuis longtemps à ceux qui aimeraient rejoindre le Christ trop tôt que ce n'est pas comme ça que ça marche ;

 - on imite le Christ globalement, pas sa passion en particulier. Sur ce point, j'ai dû me renseigner auprès d'un spécialiste - sachant que justement, je n'en suis pas un, et que cela aggrave le cas de M. Onfray : même quelqu'un qui n'y connaît pas grand-chose voit qu'il délire. Bref : l'imitation peut effectivement aller jusqu'au sacrifice,  et on l'a vu au fil de l'histoire de nombreux saints et martyrs, mais le sacrifice n'est pas une fin en soi. Lier un fantasmé « désir de la mort » avec une « imitation de la passion» présentée comme un devoir, cela relève du braquage intellectuel ;

 - « plaisir pris au cadavre »  : l'expression d'une part est maladroite et peu claire, d'autre part ne s'applique absolument pas au christianisme - laissez les morts enterrer les morts, bordel ! Ajoutons rapidement que lorsqu'on relit Muray comme je le fais en ce moment et qu'on est de ce fait abreuvé quotidiennement de citations antichrétiennes et nécrophiles d'auteurs souvent socialistes du XIXe, on éclate de rire en lisant une telle bêtise ;

 - je passe directement à la dernière formule : « amour du prochain universel pour réaliser son salut » , ça ne veut rien dire et c'est faux, belle conjugaison de deux défauts peu aisés à concilier. On doit commencer par aimer son prochain comme soi-même, personne n'a dit que c'était facile, c'est au contraire déjà une forme d'ascèse ;

 - un mot sur la deuxième partie du paragraphe. Imaginons que c'est par simple maladresse que M. Onfray semble reprocher au christianisme une négation de la frugalité, un rôle dans la société de consommation ou un mépris de l'amitié (laquelle il est vrai n'est pas spécialement valorisée par la théologie chrétienne), et signalons qu'il y a d'importantes distinctions à faire entre « la consommation », « l'accumulation », « le luxe » et « le superfétatoire ». Il y avait, et c'est heureux, du luxe avant que la société ne devienne de consommation, il est même possible qu'à terme celle-ci tue celui-là (ou ne le vide de sens) - et il n'y a aucune honte à aimer le luxe, tant qu'on sait ne pas en dépendre plus que de raison. Si l'on enlève « le superfétatoire », il ne reste que le nécessaire… comme pour les animaux. Un grand progrès !

Je m'arrête là, sauf demande du public, le reste de l'interview contient d'autres perles.  

(Pourquoi Alain de Benoist, qui interroge notre sommité athée, est-il si indulgent, voire flagorneur ? Sympathie personnelle, anticléricalisme fraternel ? Il est vrai que de même que l'intelligence d'Alain Finkielkraut semble se figer lorsqu'il est question d'Israël, celle du père fondateur d'Éléments se fait moins rigoureuse dès que le mot « païen » point le bout de son défunt nez. On peut en dire autant d'Alain Soral quand il évoque l'Islam ou de Marc-Édouard Nabe avec les Arabes de France. - Chacun sa faiblesse !)