jeudi 6 septembre 2018

Pour un antisémitisme non soralien...

Suite du précédent, et en même temps cause du précédent. Il fallait en effet, dans un premier moment, énoncer clairement nos critiques à l’égard de certaines tentations antisémites d’esprit « européen », « aryen », « grec », « indo-européen », « nietzschéen », etc., avant de s’attaquer à une autre forme d’antisémitisme. Voici donc la citation du jour, l’auteur est Alain Soral : 

"Dans ces temps de mensonges de plus en plus troublés, nous nous devons de répéter que ce judéo-christianisme qu’on veut nous vendre, en travestissant la parole de de Gaulle, est un oxymore, comme l’impossibilité d’un monarcho-républicanisme, il ne peut désigner, au mieux, qu’une rupture radicale, une inversion de sens à partir d’un même substrat. Du Dieu unique de haine au Dieu d’amour, de la loi imposée par Dieu à la loi débattue et choisie par les hommes. Le judaïsme – qui est l’idéologie profonde d’Israël – n’a pas plus à voir avec l’Europe et la France que l’islam. Et ceux qui refusent l’un au nom de la culture européenne, devraient avoir la cohérence et le courage de refuser l’autre…"

Je ne suis pas un anti-soralien primaire, et je trouve qu’il y a dans l’interview dont ces phrases sont extraites (https://www.breizh-info.com/2018/09/04/101689/interview-alain-soral-egalite-reconciliation) d’intéressantes remarques, notamment, donc, sur les fantasmes européens de certains. Et A. Soral a beau jeu de remarquer que certains Juifs anti-immigration prennent actuellement sans vergogne la place de Jean-Marie Le Pen, et parlent à sa place, presque comme s’il n’avait jamais existé (un négationnisme peut en cacher un autre)… - Ceci étant dit, on trouve tout de même dans ce paragraphe un paquet de stupidités. 

S’il y a bien en effet quelque chose que l’on comprend en lisant, comme je suis en train de le faire, l’Ancien Testament, c’est précisément que l’on ne peut extirper de notre culture son élément juif, ceci que ce soit d’un point « goethéen » ou d’un point de vue « soralien », d’un point de vue « païen » ou d’un point de vue « chrétien » (mauvais chrétien en l’occurence si l’on en reste à Alain Soral, ici totalement coupable d’hérésie marcioniste). Autant, je suis bien d’accord (et de nombreux Juifs ne doivent pas en penser moins de leur côté), il y a beaucoup à dire sur le concept de « judéo-christianisme », autant prétendre que le judaïsme - même talmudique, etc. - nous est aussi étranger que l’Islam, c’est de l’escroquerie intellectuelle. Il est bien évident qu’en face se situe une autre escroquerie, celle qui cherche à ramener toute la culture occidentale au judaïsme - même talmudique, etc. -, je ne contredirai certes pas Alain Soral là-dessus. Mais son opposition forcée entre le Dieu de haine et le Dieu d’amour (de plus, où dans le Nouveau Testament a-t-il été chercher cette loi débattue et choisie par les hommes ?) ne tient pas debout - et ce n’est pas avec le contrepoint de sa bienveillance envers les Musulmans (dont le Dieu n’est pas franchement d’amour, dont la loi n’est guère débattue et choisie par les hommes…) qui va améliorer la stabilité de cet édifice intellectuel. De ce point de vue, les « européens-pagano-nietzchéens-nouvelle-droite… » sont plus cohérents lorsqu’ils critiquent tous les monothéismes, en tant que monothéismes. 


Pourquoi ces remarques, tant sur ce qui était peut-être un propos de table de Goethe que sur une réponse mal rédigée d’Alain Soral ? Je serais tenté de répondre : mais par antisémitisme, justement ! J’entends par là : si l’on veut critiquer le judaïsme biblique, le judaïsme talmudique, les Juifs dans l’histoire, le sionisme, Bernard-Henri « J’aime l’odeur du sang libyen au petit matin » Lévy,  et ainsi de suite, très bien, mais il serait tout de même plus intelligent de critiquer ces religions, idéologies, concepts, personnes, pour de bonnes raisons. Cela nous ferait gagner du temps à tous, ce qui n’est pas un luxe. Si l’on veut : l’intéressant n’est pas d’être le plus politiquement incorrect - qu’il s’agisse des Juifs, des homosexuels, des LGBT, de Macron… -, mais d’être le plus proche de la vérité. Si vous pensez que c’est une banalité, relisez-donc la citation de J. Madiran que je vous ai recopiée le 1er de ce mois.