samedi 1 septembre 2018

Madiran en complément de Bloy. "La seule révolution est intérieure, spirituelle, permanente…"

Ai-je déjà cité ces lignes de Madiran, les pages de conclusion de Ils ne savent pas ce qu’ils disent (1955) ? Une brève recherche Google semble devoir m’amener à conclure que non, subsiste en mon esprit un léger doute. Au pire, mieux vaut répéter plusieurs fois une chose intéressante qu’énoncer une connerie une seule fois…

"Nous parlons à la presse catholique pour lui dire : vous vous faites beaucoup de souci pour les impasses politiques, économiques, sociales, coloniales que vous apercevez autour de vous. Et nous vous comprenons. Mais ces impasses manifestent la décadence française. 

Nous sommes temporellement engagés tous ensemble dans un processus de décadence. Ce genre de processus n’est pas irréversible en théorie, il l’est souvent en fait. L’histoire nous montre beaucoup de décadences, et leurs causes sont analysées de manière très vraisemblable par les historiens. Mais ce qui me frappe le plus est leur caractère mystérieux de cauchemar : on a obscurément conscience qu’il suffirait d’un rien pour se réveiller, et pourtant l’on n’arrive pas à s’en déprendre. Nous en sommes là, je crois. 

La seule espérance est révolutionnaire. Mais attention : les révolutions politiques et sociales sont d’une vanité dérisoire. Elles veulent supprimer par la violence matérielle les malfaçons, les maux, les injustices d’une société : il leur est bien difficile de boucher des trous sans en creuser de nouveaux. 


La véritable, la seule révolution est intérieure, spirituelle, permanente ; et silencieuse : ce qui ne veut pas dire que les publicistes eux-mêmes ne puissent pas, très modestement, y contribuer ; elle ne se manifeste ordinairement que par une série d’ « échecs » temporels, le disciple n’est pas au-dessus du Maître. Jusqu’au jour où l’on s’aperçoit, mais bien après coup, que l’esprit a changé, et que toutes choses en ont été depuis longtemps imperceptiblement mais profondément modifiées. C’est là toute l’histoire du Christianisme, que chacun de nous est appelé à recommencer pour son compte à chaque instant, dans sa prière quotidienne et dans sa tâche de chaque jour. Il n’y a pas d’autre problème."