Mise en bouche (Connaissance philosophique).
Revenons brièvement à nos plaisirs philosophico-politiques - pour aujourd'hui, je n'insisterai que sur le versant philosophique.
Où sont les pensées ? A l'intérieur des invidivus ? A l'extérieur ? Ailleurs ? Où ? Vincent Descombes, dans La denrée mentale (Minuit, 1995), procède à une critique minutieuse des théories qui situent les pensées à l'intérieur du cerveau, et plaide "la thèse de l'extériorité de l'esprit". Cela a l'air d'une énormité ? Que l'on considère alors l'extrait suivant :
"On parle d'agir sur l'esprit de quelqu'un. Mais on n'agit pas sur l'esprit de quelqu'un en agissant sur une partie de ce quelqu'un (pour ébranler par là sa machine interne), contrairement à ce que suggèrent certaines images (s'adresser à sa tête, à son cœur). L'image de la manipulation est plutôt celle d'une marionnette dont l'orateur habile saurait tirer les ficelles. S'il y avait un mécanisme, il serait dehors, car la personne à persuader, loin de contenir sous son épiderme la chaîne causale qu'il s'agit d'activer, est lui-même imaginé comme une pièce appartenant à la machine. On agit sur quelqu'un, on le manipule en tenant pour acquis que cette personne fait partie d'un tout plus large, et qu'on peut amener cette personne à décider d'une certaine façon ou à adopter notre cause en agissant sur ce tout. (...) L'avocat qui agit sur l'esprit des jurés en leur présentant des témoignages ou des documents obtient ses effets en modifiant le monde dans lesquels se situent ces jurés. Par exemple, il parvient à faire entrer dans la classe des faits de notoriété publique certains détails favorables à son client, de telle sorte que les jurés vont avoir une autre perception de toute l'affaire, non pas parce qu'ils auront été modifiés de l'intérieur (comme ils l'auraient été par l'ingestion d'une drogue), mais parce qu'ils auront été placés devant des pièces et des documents nouveaux." (Je souligne)
Dans un deuxième volume, que je n'ai pas encore lu, Les institutions du sens, Descombes développe les causes et conséquences anthropologiques de la thèse de l'extériorité de l'esprit. Nous retrouverons alors sans doute nos plaisirs politiques habituels, que pour l'heure l'"affaire Clearstream" (que Dieu efface Sodome, Gomorrhe et Luxembourg de la surface de la terre !) ne me semble pas valoir.
Où sont les pensées ? A l'intérieur des invidivus ? A l'extérieur ? Ailleurs ? Où ? Vincent Descombes, dans La denrée mentale (Minuit, 1995), procède à une critique minutieuse des théories qui situent les pensées à l'intérieur du cerveau, et plaide "la thèse de l'extériorité de l'esprit". Cela a l'air d'une énormité ? Que l'on considère alors l'extrait suivant :
"On parle d'agir sur l'esprit de quelqu'un. Mais on n'agit pas sur l'esprit de quelqu'un en agissant sur une partie de ce quelqu'un (pour ébranler par là sa machine interne), contrairement à ce que suggèrent certaines images (s'adresser à sa tête, à son cœur). L'image de la manipulation est plutôt celle d'une marionnette dont l'orateur habile saurait tirer les ficelles. S'il y avait un mécanisme, il serait dehors, car la personne à persuader, loin de contenir sous son épiderme la chaîne causale qu'il s'agit d'activer, est lui-même imaginé comme une pièce appartenant à la machine. On agit sur quelqu'un, on le manipule en tenant pour acquis que cette personne fait partie d'un tout plus large, et qu'on peut amener cette personne à décider d'une certaine façon ou à adopter notre cause en agissant sur ce tout. (...) L'avocat qui agit sur l'esprit des jurés en leur présentant des témoignages ou des documents obtient ses effets en modifiant le monde dans lesquels se situent ces jurés. Par exemple, il parvient à faire entrer dans la classe des faits de notoriété publique certains détails favorables à son client, de telle sorte que les jurés vont avoir une autre perception de toute l'affaire, non pas parce qu'ils auront été modifiés de l'intérieur (comme ils l'auraient été par l'ingestion d'une drogue), mais parce qu'ils auront été placés devant des pièces et des documents nouveaux." (Je souligne)
Dans un deuxième volume, que je n'ai pas encore lu, Les institutions du sens, Descombes développe les causes et conséquences anthropologiques de la thèse de l'extériorité de l'esprit. Nous retrouverons alors sans doute nos plaisirs politiques habituels, que pour l'heure l'"affaire Clearstream" (que Dieu efface Sodome, Gomorrhe et Luxembourg de la surface de la terre !) ne me semble pas valoir.
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