vendredi 6 avril 2018

Relégués à l'arrière-plan.

Voici un autre passage de Morand, quelques pages plus loin dans le même livre, plus approfondi que la citation d’hier : 





"Tombouctou, qui fut jadis une cité de plus cent mille âmes, n’est plus qu’un village de cinq mille habitants. Envahie par le désert, gonflée de poussière, pénétrée par les sables, recroquevillée par les nuits fraîches, dilatée par la chaleur, fendue par les écarts de température, bâtie en matériaux périssables, elle tombe en ruines et n’a plus d’importance stratégique ou commerciale. Cependant l’impression que laisse Tombouctou est très forte. C’est la fin du monde nègre, de la beauté des corps, des gras pâturages, de la joie de vivre, du bruit, des rires : ici commence l’Islam avec son intolérance, sa silencieuse sérénité, sa décrépitude : pas une culture, pas une irrigation, malgré le Niger à quelques kilomètres, pas un édifice, ni une route, ni un ouvrage d’art. Le sable fait éternuer comme du poivre, assèche et étouffe les poumons. Le pas feutré par ce sable, qui amortit tout bruit, les maisons sans fenêtres, qu’on dirait fortifiées, le vent coupant du désert, des têtes sinistres vous épiant derrière les grillages de bois peint, derrière les portes cloutées comme des coffre-forts, les terrains vagues, les rues tortueuses, les entrées disposées en chicane et les places désertes où seuls quelques méharis reposent à l’ombre, gardés par un Touareg voilé, maigre comme une chèvre, la bouche barrée de noir, je n’oublierai plus cela. Les nègres, à Tombouctou, ne sont pas beaux, tant il y a eu de croisements, de métissages. Ils sont relégués à l’arrière-plan. Les femmes sont effrontées et habituées à servir, à exploiter l’étranger, à calmer le jeûne de générations de voyageurs. Elles descendent des anciennes courtisanes de Tombouctou, célèbres par leur culture et leurs appâts sociables. Déjà, en 1350, Ibn Batouta, voyageur arabe, remarquait avec indignation qu’ici « les femmes recevaient des hommes sans que leur mari en prissent ombrage ». On reconnaît là déjà la facilité de moeurs des Noirs. C’est que Tombouctou, s’il est l’Islam, n’est pas l’Islam pur."


Quelques pages plus loin encore, feuilletant le livre, je suis tombé sur : 


"Le Nord s’avilit chaque fois qu’il s’allie au Midi. La ruée vers la Côte d’Azur est le prologue de l’engouement nègre."