samedi 21 juillet 2018

L'Algérie française. Drôle d'expression...

Nous en arrivons donc, en suivant Raoul Girardet, à l’Algérie. Première citation. 

" - Comment expliquez-vous… l’attitude du général de Gaulle ?

Je pense que les historiens d’aujourd’hui sont bien imprudents lorsqu’ils dépassent les limites de l’hypothèse. Pour ma part, je crois, et j’essaie en l’occurrence de ne pas être partisan, que de Gaulle n’avait, en arrivant au pouvoir, aucune politique algérienne strictement définie. Il était persuadé, selon toute vraisemblance, que la seule fin du « régime des partis », la seule « restauration de l’autorité de l’État », confondu bien sûr avec sa personne, devait permettre le règlement relativement aisé du problème. D’où toute une série d’initiatives diverses, et toutes promises à l’échec. Le fardeau lui apparaissant de plus en plus lourd, une seule possibilité lui est finalement restée : celle de traiter avec le F.L.N., c’est-à-dire de lui livrer l’Algérie…

Je ne voudrais pas passer pour un anti-gaulliste inconditionnel et obsessionnel. Comme tout le monde, j’ai connu mon moment de gaullisme. Paradoxalement, ce ne fut pas dans la Résistance, période au cours de laquelle, comme beaucoup d’autres de mes camarades d’ailleurs, le personnage me déroutait, m’inquiétait même, bien plus qu’il ne me subjuguait. Ce fut dans les années suivantes lorsqu’il m’apparut, progressivement, comme le seul recours possible devant ce qui me semblait être la faillite inéluctable d’un régime… Et il n’est certes pas question de nier l’extraordinaire dimension historique du Général. L’appel du 18 Juin continue à m’apparaître comme quelque chose d’assez étonnant. Non pas, comme on le dit généralement, par la vision historique qu’il exprimait : que la guerre ne soit pas finie, que les Allemands n’aient pas remporté une victoire définitive, que la France puisse un jour rentrer dans la lutte, c’était là le thème constant que j’ai entendu développer dans l’été 40, au sein de l’armée d’armistice. Mais l’admirable est le geste du refus, de la désobéissance, le courage de se dresser seul, contre ce qui était alors considéré à la fois comme la légitimité et la nécessité par l’immense majorité des Français.

Le de Gaulle de 1962 continue à me paraître l’inverse du de Gaulle de 1940 : il est devenu l’homme du compromis, du pseudo-réalisme politique, de la négociation à tout prix, de la soumission à ce qui semble être la fatalité de l’Histoire. Il faut ajouter qu’il a toujours porté cette tare caractéristique de ce « parti national » dont  idéologiquement il relève : celle de prétendre représenter seul les grands intérêts de la patrie, d’en avoir le monopole, d’exclure et d’excommunier ceux qui pouvaient avoir, de ces intérêts et de cette patrie, une autre conception ou une autre vision."


De Gaulle, du courage au cynisme, du courage à la répression du courage… A suivre !