mercredi 29 mai 2019

Baudelaire, encore et toujours.

"Il faut travailler, sinon par goût, au moins par désespoir, puisque, tout bien vérifié, travailler est moins ennuyeux que s’amuser."

"Il y a dans tout homme, à toute heure, deux postulations simultanées, l’une vers Dieu, l’autre vers Satan. L’invocation à Dieu, ou spiritualité, est un désir de monter en grade ; celle de Satan, ou animalité, est une joie de descendre. C’est à cette dernière que doivent être rapportés les amours pour les femmes et les conversations intimes avec les animaux, chiens, chats, etc." - que dirait-il maintenant, à l’âge des justifications progressistes en tous genres pour justifier les joies de descendre les plus incongrues, sinistres, contre-nature, ignobles, liste non exhaustive…

"La peine de Mort est le résultat d’une idée mystique, totalement incomprise aujourd’hui. La peine de Mort n’a pas pour but de sauver la société, matériellement du moins. Elle a pour but de sauver (spirituellement) la société et le coupable. Pour que le sacrifice soit parfait, il faut qu’il y ait assentiment et joie de la part de la victime. Donner du chloroforme à un condamné à mort serait une impiété, car ce serait lui enlever la conscience de sa grandeur comme victime et lui supprimer les chances de gagner le Paradis."

"Il n’existe que trois êtres respectables : 
Le prêtre, le guerrier, le poète. Savoir, tuer, créer.
Les autres hommes sont taillables et corvéables, faits pour l’écurie, c’est-à-dire pour exercer ce qu’on appelle des professions."

Quitte à vous surprendre, je pensais à part moi que le marchand pouvait aussi avoir sa dignité, inférieure certes à celle de ces trois ordres, mais réelle : il n’exerce pas une profession ; il met de l’huile dans les rouages des relations entre les différents membres de la société. Je découvre quelques pages plus loin que Baudelaire a rejeté cette hypothèse : "Le commerce est, par son essence, satanique." Révérence gardée, il me semble ceci dit, et depuis des années, puisque j’ai formulé clairement cette idée au moins en 2009 (ici : http://cafeducommerce.blogspot.com/2009/09/election-piege-c-ii.html), que c’est la généralisation du commerce comme modèle et horizon des sociétés humaines qui est satanique, pas son existence même. 

Ceci étant, encore quelques sentences baudelairiennes. Je passe pour aujourd’hui les méchancetés sur George Sand, pour me concentrer sur celles qui ont pour cible Arouet : 

"Je m’ennuie en France, surtout parce que tout le monde y ressemble à Voltaire. 
Emerson a oublié Voltaire dans ses Représentants de l’humanité. Il aurait pu faire un joli chapitre intitulé : Voltaire, ou l’anti-poète, le roi des badauds, le prince des superficiels, l’anti-artiste, le prédicateur des concierges, le père Gigogne des rédacteurs du Siècle

Dans Les oreilles du comte de Chesterfield, Voltaire plaisante sur cette âme immortelle qui a résidé pendant neuf mois entre les excréments et des urines. Voltaire, comme tous les paresseux, haïssait le mystère.

[Ici, une note de Baudelaire : "Au moins aurait-il pu deviner dans cette localisation une malice ou une satire de la providence contre l’amour, et, dans le mode de la génération, un signe du péché originel. De fait, nous ne pouvons faire l’amour qu’avec des organes excrémentiels."]

Ne pouvant pas supprimer l’amour, l’Église a voulu au moins le désinfecter, et elle a fait le mariage."


Où l’on retrouve saint Paul… A bientôt !