Furieusement actuel, y compris au temps du Covid...
"Canjuers et Debord ont raison dans leurs Préliminaires, la société capitaliste moderne n'a pas de culture parce qu'elle n'en a pas besoin et c'est tant mieux. Le concept de richesse existe objectivement pour tous les hommes. Notre époque est celle qui a la chance de connaître le concept objectif de la richesse, le spectacle de la richesse universelle, car elle a le malheur d'en connaître tous les moyens pratiques dans toute l'étendue de leur aliénation, la division mondiale et infinie du travail par l'Etat et la marchandise. Elle est capable de résoudre cette question car elle est capable, enfin, de se la poser et bien entendu pas seulement dans la théorie. Elle peut exiger la richesse dans la théorie parce que la richesse est devenu une exigence du monde dans le monde.
Il revient à l'I.S. d'avoir formulé pour la première fois un concept pratique de la richesse. Elle parvient à concevoir la richesse comme richesse de la communication et pratique de la communication et elle se déclare du parti de ceux qui ont pour but la communication totale. Cependant bien qu'elle ait insisté sur le côté pratique de la communication en concevant celle-ci comme une construction de situation, elle ne parvient jamais à concevoir le contenu pratique de la communication. Le contenu pratique, concret, de la communication, le contenu pratique, concret, de la richesse, est la division du travail. Là où l'on ne divise pas de travail on ne communique pas. Là où l'on ne divise pas de travail on est pauvre.
Face à l'utilitarisme de l'économie politique, l'art moderne représente le point de vue anti-utilitariste conscient de soi de la richesse pratique. La richesse pratique, la communication pratique est une exigence de l'art. Seulement l'art est condamné, faute de moyens pratiques, à ne communiquer que d'une manière artistique, c'est-à-dire non pratique. L'art est la communication dans la pensée, pas même communication de la pensée ou communication pensée, communication théorique et théorie de la communication, seulement pratique de la communication dans la pensée. Si l’« art » des sociétés primitives a un côté essentiellement pratique, c'est-à-dire non artistique, c'est simplement que dans les sociétés primitives l'art n'est pas encore séparé de la richesse pratique elle-même dont il est un moment. S'il n'est pas artistique, c'est parce qu'il a encore des pouvoirs pratiques, c'est-à-dire sociaux. L'art primitif n'est pas artistique. C'est la société primitive qui est artistique. L'exigence de la richesse n'y est pas encore séparée et opposée à la richesse pratique. L'art devient artistique quand la société cesse de l'être. L'art moderne commence avec les Médicis. Il finit avec les Rothschild, c'est-à-dire quand commence le prolétariat moderne. Il commence quand la richesse commence à s'opposer à la société dont elle est pourtant l'essence. Il se décompose quand se décomposent les illusions sur la richesse séparée. Contrairement à l'économie et même à la théorie de Marx, la théorie situationniste de la richesse rend compte aisément des sociétés primitives : les sauvages sont des constructeurs de situations.
Regardons, grâce à la meilleure ethnographie, comment vivent les sauvages et tout particulièrement ceux qui semblent les plus gais : tout le temps se passe en activité sociale. Tout est prétexte à activité sociale. Par exemple chez les Trobriandais, le jardinage est prétexte à une furieuse activité sociale où tout prend un caractère de défi et de magie."
La vie est une cérémonie, nom de… !
Rapport sur l’état des illusions dans notre parti, suivi de Révélations sur le principe du monde, Institut de Préhistoire contemporaine, 1979, pp. 155-157. Je rappelle que les ouvrages de Jean-Pierre Voyer sont disponibles ici : http://www.editions-anonymes.fr/
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