samedi 5 mai 2007

Un peu de tendresse dans ce monde de brutes.

"Plus tard, on joue au Zapata, on veut égorger les propriétaires et couper la tête des Yankees : on a bien raison.

L'instrument de musique du zapatiste est cette ravissante machette sur la lame de laquelle se mélangent méchamment les couleurs des haricots et de la bile, de la courge et de la cervelle, de la banane et du nez morveux. Les rouges des piments sont indissociables du sang le plus yankee. Une langue habile peut y retrouver les goûts mixés de mille tortillas et des oreilles d'instituteurs cuisinés... Des compagnies de frelons comme de petites danseuses les suivent, et des colonies entières de fourmis rouges à la trace rampent en traîne solennelle derrière le trajet zigzaguant du bandit zapatien.

Décimer ! Incendier les propriétés ! Violer les conasses ! Etrangler les grands-mères ! Pisser sur les pianos ! Ravager les haciendas ! J'aime cette trombe de vandales en folie, cette hystérie gangstérine de ploucs impitoyables, ces destructions ferroviaires de centaures illettrés, bandolérosseries dégueulasses... Ça ne ferait pas de mal à la France un petit raz-de-marée zapato-barbare, au milieu des ordinateurs et des publicités, un ouragan hunnique ainsi qui déboule Place de la Concorde, qui hache dans le tas, sans sommation, au hasard des crapules...

Le Broussard de Zapata s'appela Jésus. Sabre au clair, là-haut dans les marécages, il désarma l'Attila du Sud et puis il cribla son corps de saint des Huns mexicains. Le colonel carranziste montra bien sur la place la dépouille aux pueblos effarés : elle y resta jusqu'à ce que le vent en disperse ce que les yeux refusèrent de croire..."


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"Le Jazz est une histoire close. C'est un musée. Les rockers minables l'ont voulu ainsi. Ils lui ont volé sa place de musique populaire universelle. On proposait aux oreilles de l'authentique, ils ont préféré l'imitation, le plagiat mal fait et blancot, la photocopie à l'original... Ce scandale sera la honte de tous les manuels d'histoire du 21è siècle. Les grands artistes du tout début ont tout fait pour que notre époque soit la plus forte, la plus majestueuse et la plus éclairée, ils ne seraient pas fiers, les cubistes, les Ravel, de voir comment en moins de trente ans nous avons détruit leur travail colossal, comment avec le Jazz, nous avons laissé écraser l'éléphant par le moustique puéril et débile ! Le Jazz justifiait tout un pays et le siècle dernier en dépendait."


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"Picasso n'est pas tragique, il peut être dramatique mais sa peinture est résolument anti-tragique. Guernica est un drame. Comme celle de Joyce, l'oeuvre de Picasso ne pathosse pas. Il n'y a aucune détresse chez eux : c'est à ce prix du reste, que la virtuosité peut délirer. Il faut s'interroger sur le hasard qui fait que les deux plus grands révolutionnaires de l'art contemporain, ceux qui ont influencé le monde entier soient à ce point dépourvus de sens tragique.

Le grand courant de la peinture tragique rase l'oeuvre de Soutine. Lui, c'est le plus grand peintre tragique. J'ai toujours voué une espèce de petit dégoût pour l'expressionnisme et surtout pour la peinture expressionniste. Tous ces barbouillistes malsains qui fractionnent les lignes et la touche sentent l'escroc à souhait : c'est une peinture si laide, si sociale, dans un pathétique si facile, l'écrasement des giclures, le brouillon arrogant !... Bref tout ce qui joue sur la corde et qui brise la lumière, dans la floklore bohème et la maladresse dégueulasse."

(Textes de M.-E. Nabe quelque peu condensés par mes soins, extraits de Zigzags, 1986, pp. 73-74, 228, 255.)


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Y'a d'la joie...

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