jeudi 20 décembre 2018

"Une énigme majeure à déchiffrer."



Puisque je persiste à ne pas retrouver le livre sur Marie-Antoinette, continuons avec quelques extraits des réflexions de Marc Fumaroli : 

"Il faudra attendre Balzac et son culte des duchesses, puis dans son sillage Baudelaire et les Goncourt, pour que le mundus muliebris français, reprenant ses distances avec la vertu républicaine « à l’antique », se propose de nouveau aux écrivains et aux poètes comme une énigme majeure à déchiffrer. Ce retournement, qui a joué en faveur de la mémoire de Marie-Antoinette et de sa portraitiste d’avant l’orage, amorça la hantise du féminin commune à toutes les avant-gardes, hantise du XIXe siècle parisien et prélude au devenir contemporain d’un mundus muliebris démocratique et d’un marché mondialisé de la cosmétique, du luxe, de la mode et du shopping. A ce consumérisme des marques, Sofia Coppola a donné Marie-Antoinette pour marraine cinématographique ! Parallèlement, les nouveaux Tertullien, les nouveaux Mably, les nouveaux Fouquier-Tinville de l’islamisme égorgeur transportent eux aussi à l’échelle mondiale leur vengeresse misogynie [avec l’aide maintenant, nous sommes amenés de plus à en plus souvent à le constater, des féministes progressistes puritains d’extrême-gauche, rajoutez des guillemets là où vous le souhaitez, note de AMG]. Nul mieux que Baudelaire, prophète de la prolifération de l’image mécaniquement reproduite, n’a pressenti cette multiplication, sur toute la planète commerciale et industrielle, libératrice pour les uns, sacrilège pour les autres, de l’antique obsession du mundus muliebris.

Qui, de Baudelaire ou des frères Goncourt, a précédé l’autre au XIXe siècle dans la redécouverte du monde féminin parisien, rené et modernisé depuis la chute de l’Ancien régime, celle de Robespierre et celle de Napoléon Ier ? (…) En fait, le poète et les deux historiens (bientôt romanciers-portraitistes de femmes modernes (…)) chassaient depuis longtemps sur les mêmes terres du « féminin » parisien, réapparu dans toute son ambiguïté, plus fascinant et redoutable que jamais. Ils n’étaient pas les seuls à scruter cette féminité tenue en respect par Bonaparte, et de nouveau envahissante sous le règne de son neveu, après avoir parfumé l’Ancien régime des peintres et des romanciers du libertinage."


"La Querelle des femmes, si vive parmi les humanistes français du XVIe siècle, si âpre sous Louis XIV entre les « Anciens » misogynes (Boileau) et « Modernes » solidaires des femmes (Fontenelle), avait connu au XVIIIe siècle un flux et un reflux d’une rare amplitude, allant d’un véritable triomphe de Vénus et des grâces dans les arts et les moeurs français, à la terrible revanche misogyne des nouveaux Lycurgue, Romulus, Brutus et Caton l’Ancien, tenant le haut du pavé politique dans les années 1792 à 1794, et dont l’Empereur Napoléon, militaire et législateur dans l’âme, se montra pendant son règne le continuateur. Le romantisme, qui adopta Bonaparte et inventa sa légende, s’efforça de faire oublier cette facette misogyne du héros national, malgré l’insistance de Chateaubriand, non dépourvue de fatuité, dans ses Mémoires, sur la muflerie du général, du Premier Consul et de l’empereur, dont la conduite envers les dames était, selon lui, rien moins que galante « à la française ». René passe néanmoins sous silence le statut quasi servile et domestique que réserve aux femmes le Code Napoléon."



Je dis ça je dis rien, mais ce sont les mêmes qui ont renié Dieu au profit de l’Être suprême, et qui ont viré les femmes du pouvoir et de la Révolution… L’immédiate suite demain. Bonne soirée !