"Je n'aime pas le tam-tam…" La parole à la défense.
"(…) je me suis animé un peu... N’allez point m’estimer jaloux ! Ce serait mal reconnaître ma parfaite indépendance. Les Juifs, je les emmerde bien, ils peuvent gentiment me le rendre, à droite, comme à gauche, comme au centre, en travers, au particulier. Ils ne me gênent personnellement qu’un petit peu, presque pas. Il s’agit d’un conflit tout à fait « idéolochique ».
Certes, j’observe que par l’entremise des youpins : éditeurs, agents, publicistes, etc…, sous l’influence des films, scénarios juifs, agresseurs, branleurs pourrisseurs, de la politique juive en somme des consignes juives, occultes où officielles, la petite production artistique française, déjà si maigrichonne, si peu rayonnante, est en train bel et bien de crever... Les Juifs doivent écraser tout c’est entendu... Mais la vie n’est pas si longue, ni si joyeuse que cela puisse en vérité vous empêcher de dormir. Et puis, demeurons tout à fait équitables, les Juifs furent toujours bien aidés dans leur œuvre de destruction, d’asservissement spirituel par les maniérismes « façon noble, renaissant » et puis ensuite pusillanimes, bourgeois officiels, enfin toute la châtrerie académique, puristique, désespérément obtuse dont succombent nos arts dits français.
Ce qui nous gêne le plus dans les Juifs, quand on examine la situation, c’est leur arrogance, leur revendicarisme, leur perpétuelle martyrologo-dervicherie, leur sale tam-tam. En Afrique, chez les mêmes nègres, ou leurs cousins au Cameroun, j’ai vécu des années seul, dans un de leurs villages, en pleine forêt, sous la même paillotte, à la même calebasse. En Afrique, c’étaient des braves gens. Ici, ils me gênent, ils m’écœurent. Ils ne devenaient tout à fait insupportables au Cameroun, qu’au moment de la pleine lune, ils devenaient torturants avec leur tam-tam... Mais les autres nuits, ils vous laissaient roupiller bien tranquille, en toute sécurité. Je parle du pays « pahoin », le plus nègre pays de nègres. Mais ici, à présent, en France, Lune ou pas Lune, toujours tam-tam !... Nègres pour nègres, je préfère les anthropophages... et puis pas ici... chez eux... Au fond, c’est le seul dommage qu’ils me causent, un dommage esthétique, je n’aime pas le tam-tam... Quant à la matérielle, mon Dieu ! il m’était extrêmement facile de m’arranger... Je pouvais me payer le luxe, non seulement d’ignorer toutes ces turpitudes, mais il m’était enfantin de profiter, et comment, fort grassement, mirifiquement de cette invasion murine... putréfiante... Mille moyens, mille précédents ! Il m’était loisible entre autres, si l’on considère mes charmes, mon très avantageux physique, ma situation pécuniaire solide, d’épouser sans faire tant d’histoires, quelque petite juive bien en cour... bien apparentée... (Il en vient toujours rôder, tâter un peu le terrain), me faire naturaliser par là même, « un petit peu juif »... Prouesse qui se porte superbement en médecine, dans les Arts, la noblesse, la politique... Passeport pour tous les triomphes, pour toutes les immunités... Tous ces propos, j’en conviens, tiennent du babillage... Bagatelles !... Babillons !... Nous avons noté que les Juifs semblent avoir choisi l’anglais pour la langue de standardisation universelle (ils faillirent opter pour l’allemand)...
N’est-il pas amusant à ce propos d’observer que les jeunes Juifs des meilleures familles (Juifs français compris), se rendent le plus souvent à Oxford pour achever leurs études. « Finishing touch ! » Suprême vernis ! Si je voulais, si les circonstances m’obligeaient, je pourrais peut-être écrire directement mes livres en anglais. C’est une corde pour me défendre, une petite corde à mon arc. Je ne devrais pas me plaindre... Mais personne ne m’a fait cadeau de mon petit arc... J’aurais bien voulu qu’on me fasse dans la vie quelques cadeaux ! Tout est là !... Pour le moment je préfère encore écrire en français… Je trouve l’anglais trop mou, trop délicat, trop chochote. Mais s’il le fallait... Et puis les Juifs anglo-américains me traduisent régulièrement, autre raison... et me lisent !... Nous ne sommes pas très nombreux, parmi les auteurs français de la « classe internationale ». Voilà le plus triste. Cinq ou six, je crois... tout au plus, qui pouvons étaler... C’est peu... beaucoup trop peu !... L’invasion est à sens unique, cela me gêne.
Les éditeurs judéo-anglo-saxons, très au courant des choses de la fabrication littéraire, les reconnaissent les romans « standard », ils en font fabriquer d’exactement semblables, tous les ans, par milliers, chez eux. Ils n’ont que faire de « répliques », s’embarrasser d’autres postiches... Personnellement, il me sera possible, sans doute, de me défendre encore pendant quelque temps, grâce à mon genre incantatoire, mon lyrisme ordurier vociférant, anathématique, dans ce genre très spécial, assez juif par côtés, je fais mieux que les Juifs, je leur donne des leçons. Cela me sauve. Je passe chez les Juifs des États-Unis pour un esprit fort. Pourvu que ça dure !" (Bagatelles pour un massacre, pp. 173-74 de la réédition certes fort opportune parue pendant la guerre, le texte je le rappelle est de 1937)
J'ai choisi cet extrait un peu confus pour de nombreuses raisons, que je ne crois pas devoir expliciter par le détail, mais notamment parce que Céline, avec la conscience aiguë qu'il a toujours eue de ses singularités propres, y exprime clairement un des noeuds de l'affaire actuelle : entre lui et « les Juifs », finalement, c'est à qui gueulera le plus fort, à partir de postulats darwiniens assez semblables. Dans la mesure où Bagatelles… est non seulement un immense délire, mais aussi une compilation, presque une anthologie « célinisée » de toute la littérature antisémite, il ne faut peut-être pas essayer de voir là le dernier mot de Céline sur « les Juifs », mais, dans un tel passage, on peut reconnaître une trace du vieux reproche chrétien à leur égard - Bernanos l'utilise dans Les grands cimetières… en équivalant avec audace l'hitlérisme et la mentalité juive -, selon lequel « les Juifs » n'ont aucune pitié pour les Gentils et n'ont pas le sens du pardon et de la charité chrétienne. Venant d'un anti-chrétien farouche comme Céline, c'est assez amusant, mais au moins ne fait-il pas, ici, semblant : si le romancier Céline et le médecin Destouches sont capables de pitié, le pamphlétaire entend se situer sur le même plan que celui qu'il estime être celui de l'adversaire : à darwinien, darwinien et demi, à « revendicariste », revendicariste et demi…
Il y a de nombreuses dimensions à cette affaire : l'incroyable lâcheté de Frédéric Mitterrand ; le jeu un peu étonnant de Nicolas Sarkozy, dont on nous dit que Céline est son écrivain préféré, ce qui m'a toujours étonné : y a-t-il plus d'humain en Sarko que je ne le pensais ? ou n'a-t-il de Céline qu'une lecture très superficielle ? ; quoi qu'il en soit, on ne peut pas dire qu'il l'ait ici défendu, au contraire… à moins qu'il ne se soit amusé à contribuer à lui donner raison dans sa dénonciation de la puissance juive - pourquoi pas, après tout ? ; le communautarisme et tout le tralala ; un certain aspect franchouillard chez Céline - très complexe par ailleurs - qui le rend insupportable à certains, juifs ou non juifs, qui ne cachent pas qu'ils haïssent la franchouillardise - concept par ailleurs à définir, etc.
Mais la dimension qui m'intéresse aujourd'hui c'est cette espèce de connivence bien perçue par Céline entre les auto-proclamés porte-parole de la communauté juive, et lui-même, ce jeu pervers (et dangereux), à qui gueulera le plus fort, lequel permet à certains d'occuper l'espace, parfois pour longtemps. Péguy avait diagnostiqué des phénomènes de ce genre, j'avais dans le temps cru pouvoir repérer les mêmes tendances dans le couple Lanzmann-Faurisson, et quelque part, je crois que c'est ce qui énerve les merdeux du genre Klarsfeld chez Céline : s'ils ne peuvent supporter qu'il soit « commémoré » ou « célébré » par la République, en raison des ignominies qu'il a effectivement écrites, ils sentent aussi qu'en le faisant condamner ils jouent son jeu, et s'ils ont un peu mémoire des textes, ils savent que Céline le savait - et la leur mettait bien profond par avance. Quelque part, c'est amusant, mais on remarquera que les juifs tendance « majorité silencieuse », n'y gagnent rien dans l'affaire, au contraire.
P.S. : vous trouverez ici un autre texte de Céline, écrit après la guerre, sur son rapport aux « Juifs ». J'en profite pour un mea culpa relativement à mon analyse du volume de la Pléiade regroupant les lettres du maître, au sujet de son potentiel négationnisme. D'abord, j'emploie un ton un peu condescendant qu'avec le recul je ne trouve pas nécessaire à l'endroit de Henri Godard et Jean-Paul Louis (dont par ailleurs je ne m'étais pas souvenu qu'il était le directeur des éditions du Lérot, je n'ai percuté que quelques jours après) ; ensuite, j'ai contacté Jean-Paul Louis, justement, pour lui faire de mes observations, et n'ai jamais exploité sa réponse. Il me rappelait la publication dans le Pléiade d'une autre lettre de Céline relative au négationnisme, pour me montrer qu'il n'avait pas voulu cacher le sujet. Depuis presque un an, j'aurais pu prendre le temps de répondre, et j'arrive maintenant un peu après la bataille que j'ai moi-même déclenchée. Quoi qu'il en soit, je maintiens mon analyse : les éditeurs des lettres de Céline ont fait ce qu'ils ont jugé bon pour donner du « négationnisme » de l'auteur une connaissance suffisante - je ne l'ai jamais nié - mais il reste malheureux qu'ils n'aient pas fait figurer dans le volume cette pièce essentielle où il est fait mention de la « magique » chambre à gaz. Il est vrai qu'on aurait alors sans doute entendu le vieux Klarsfeld...
Libellés : antisémitisme, Bernanos, Céline, Communautarisme, Frédéric Mitterrand, H. Godard, J.-P. Louis, Péguy, S. Klarsfeld, Sarkozy, Sionisme
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