mardi 17 avril 2018

Insensiblement.




Ernest Hello, sur saint Joseph, le père de qui-vous-savez, respirons un peu : 

"Dans quel abîme intérieur devait résider l’homme qui sentait Jésus et Marie lui obéir, l’homme à qui de tels mystères étaient familiers et à qui le silence révélait la profondeur du secret dont il était gardien ! Quand il taillait ses morceaux de bois, quand il voyait l’Enfant travailler sous ses ordres, ses sentiments, creusés par cette situation inouïe, se livraient au silence qui les creusait encore ; et du fond de la profondeur où il vivait avec son travail, il avait la force de ne pas dire aux hommes : Le Fils de Dieu est ici. 

Son silence ressemble à un hommage rendu à l’inexprimable. C’était l’abdication de la Parole devant l’Insondable et devant l’Immense. Cependant l’Évangile qui dit si peu de mots, a les siècles pour commentateurs ; je pourrais dire qu’il a les siècles pour commentaires. Les siècles creusent ses paroles et font jaillir du caillou l’étincelle vivante. Les siècles sont chargés d’amener à la lumière les choses du secret. (…) Mais voici quelque chose d’étrange : chaque siècle à deux faces, la face chrétienne et la face antichrétienne ; la face chrétienne s’oppose en général à la face antichrétienne par un contraste direct et frappant. (…) Le dix-neuvième siècle est par-dessus tout, dans tous les sens du mot, le siècle de la Parole. Bonne ou mauvaise, la Parole remplit notre air. Rien n’est bruyant comme l’homme moderne : il aime le bruit, il veut en faire autour des autres, il veut surtout que les autres en fassent autour de lui. Le bruit est sa passion, sa vie, son atmosphère. (…) Le dix-neuvième siècle parle, pleure, crie, se vante et désespère. Il fait étalage de tout. Lui qui déteste la confession secrète, il éclate à chaque instant en confessions publiques. Il vocifère, il exagère, il rugit. Eh bien ! ce sera ce siècle, ce siècle de vacarme, qui verra s’élever et grandir dans le ciel de l’Église la gloire de saint Joseph. Il est plus connu, plus prié, plus honoré qu’autrefois. 


Au milieu du tonnerre et des éclairs, la révélation de son silence se produit insensiblement."