mercredi 25 juillet 2018

Le mot de la fin. (J’ai à deux reprises, instinctivement, écrit : le mort de la fin.)

Laissons une dernière fois la parole à Raoul Girardet : 

"J’ai toujours eu l’intention de faire un jour une anthologie, un choix de textes que j’intitulerai « la France de » : la France de Maurras et celle de Jaurès, la France de Giraudoux et celle de Bernanos, la France de Michelet et celle de Veuillot, la France de Péguy et celle de cet Anatole qui en fait justement son nom de plume… Tant d’images différentes, en vérité, que l’on en arrive à se demander si la France n’a pas toujours été rêvée, si son image ne relève pas des forces de l’imagination et du coeur, bien plus que d’une réalité concrètement saisissable. 

Constatation intéressante : au-delà de leurs contradictions, presque tous ceux qui dressent ainsi une certaine image admirée, exaltée de la France, établissent une curieuse distinction entre la France (qu’ils célèbrent) et les Français (qu’ils jugent sans aménité). En d’autres termes, il est moins aisé qu’on ne peut le croire de trouver des gens qui aiment à la fois la France et les Français. A la limite, on irait jusqu’à dire que la présence des Français abîme, ternit l’idée de la France. (…) L’image la plus pure de la France serait en somme celle qui se trouverait débarrassée des Français. J’ignore si ce type d’absolutisation de l’idée nationale se trouve exprimée jusqu’à ce point dans d’autres pays. Je n’en suis pas sûr. Il faudrait y voir, si ce n’était pas le cas, l’un des traits spécifiques d’une certaine conception de l’identité nationale - qu’il resterait à définir."

Ce n’est pas "La France aux Français", mais - à gauche comme à droite, là est l’intérêt de ces remarques, "La France contre les Français". On pourrait dire que c’est justement cette image trop rêvée de la France qui fait (se) déprécier les Français, mais cela revient à repousser d’un cran la question. Peut-être est-ce une forme de prix à payer pour une place si exceptionnelle, à tous les niveaux, dans l’histoire du continent qui fut longtemps le seul à avoir une histoire. Il est clair en tout cas que cela ne peut guère aider à agir dans les circonstances actuelles, si même ceux qui aiment le pays ne sont pas fâchés que ceux qui y vivent depuis toujours disparaissent... Peut-être faut-il, tout autant que de parler d’une « réconciliation nationale », travailler à réconcilier la France d’avec les Français. 


Je vous laisse sur ces remarques et pars à l’étranger. Pas définitivement - en principe… -, seulement pour quelques vacances. J’ignore si j’alimenterai mon comptoir pendant cette période, j’ai du mal à m’imaginer le faire à un rythme quotidien. Et à mon retour… je verrai bien. Lorsque l’on en arrive au stade où l’on anticipe avant même d’être parti la tristesse que l’on aura  à constater de nouveau le déplorable état de sa pauvre France à son retour, c’est que l’on a vraiment besoin de couper. - Il semble, quoi qu’il en soit, que la fréquentation de ce café augmente de façon très sensible depuis deux-trois mois, je ne sais pas si mes facéties sur Twitter y sont pour quelque chose, j’imagine que mon rythme régulier d’écriture n’y est pas pour rien, ce serait dommage certes de briser cet élan (relatif, je vous rassure). Qui vivra verra ! Et merci à tous ! 





Une dernière, à la toute fin du livre : 

" - Être Français, pour vous, qu’est-ce que cela peut signifier aujourd’hui ?


 Attendre le prochain film de Rohmer."