"Le plus grand créateur d’êtres vivants qui ait existé." - après Dieu, tout de même.
"L’oeuvre de Balzac est celle d’un naturaliste social, « le plus grand créateur d’êtres vivants qui ait existé », dit Thibaudet. L’auteur de La Comédie humaine n’a pas seulement créé, ou recréé la vie. Il a rivalisé avec elle.
Je veux encore observer que si Balzac était né au début de ce siècle [le XXe], ses idéaux, son génie, sa parfaite indépendance l’eussent conduit à une mort à peu près certaine, ou au silence. Peut-être l’eût-on fusillé, déporté, proscrit. Il est sûr qu’il aurait connu la prison, le bagne, l’exil. En vingt et un ans, jamais il n’aurait pu écrire les Mille et une Nuits du roman.
Même s’il était doué d’une sorte de génie balzacien, un romancier contemporain serait incapable de continuer La Comédie humaine ; en effet, ce que Balzac mettait en scène a perdu, et perd chaque jour, une grande partie de son caractère humain.
L’animalité triomphe partout avec éclat. Le troupeau humain court à l’abîme en piétinant avec une morne sauvagerie tout ce qui faisait la grandeur de l’homme. Certes, il existe encore de petits îlots de réfractaires qui luttent, immobiles, contre le courant, qui essaient de ne pas être submergés. Sans doute pourraient-ils endiguer le flot dévastateur s’ils s’unissaient, s’entraidaient et prenaient conscience de l’immense force qu’ils représentent. Mais la confusion, l’orgueil, l’égoïsme sont toujours les plus forts.
L’Occident, depuis une trentaine d’années, semble être le jouet perpétuel d’une machination et d’une machinerie. La comédie que nous avons à écrire concerne des hommes qui sont devenus machinaux. En sorte qu’il ne s’agit plus d’une Comédie humaine. Il s’agit d’une Comédie à machines."
Saint-Paulien, dans l’introduction à son roman La main de gloire, 1962. C’est une des malédictions du temps qui a précédé le nôtre, que les témoins les plus lucides de la catastrophe à venir aient été soit de fieffés fascistes ou antisémites, comme Saint-Paulien ou Céline (lequel est évoqué quelques lignes plus loin dans cette préface), et à cet égard inaudibles, soit, à gauche, des anti-productivistes étouffés par le PCF et les socio-démocrates, anti-productivistes dont la postérité baba-cool, dans les années 70, sombra vite, malgré la pertinence des questions qu’elle posait, dans le ridicule de la fumette partouzarde. Quant aux catholiques, les seuls qui avaient à la fois les concepts pour penser le présent et le nombre pour se faire entendre, ils se prirent les pieds dans des équivoques et des balourdises, qu’avec l’aide de Jean Madiran j’essaierai de vous démêler à l’occasion. - C’est la vie !
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