lundi 4 mai 2009

« US go home » ?

et


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(Ajouts et corrections le lendemain.)



Les Etats-Unis, donc.

Marcel Gauchet a récemment mis en ligne sur son site deux interviews, anti-Sarkozy, au sujet de « la démocratie du privé » et de la réforme de l'université.

Voici un extrait du premier entretien, pour Libéramerde :

"L’idée que nous sommes passés d’une « démocratie du public » à une « démocratie du privé » est au cœur de votre réflexion actuelle. Qu’entendez-vous par là ?

Pour le dire abruptement, la question est de savoir si le collectif jouit d’une existence indépendante de celle des êtres qui le composent. Si oui, on peut lui donner une expression institutionnelle, une expression publique, distincte de l’expression privée des individus, qui ont par ailleurs voix au chapitre. Historiquement, c’est cette idée qui a longtemps prévalu. Elle a eu de beaux jours politiques, spécialement en France, où elle a constitué l’âme de l’Etat républicain. Dans ce cadre, les libertés individuelles sont supposées s’accomplir par la participation à la chose publique. Parallèlement, il est vrai, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis avaient développé des modèles plaçant l’accent davantage sur les libertés individuelles que sur la chose publique, sans ignorer le rôle de celle-ci. Mais depuis une trentaine d’années, cette tradition anglo-américaine s’est radicalisée et diffusée partout. La pente du monde est de remettre en question toutes les formes de collectivisation de l’existence politique, au nom de l’idée qu’il n’existe que les individus réels et leurs intérêts particuliers, et que c’est de leur interaction que doivent surgir les compromis acceptables pour tout le monde. C’est ce qu’on appelle le néolibéralisme. La chose publique, dans ce cadre, n’a plus de consistance par elle-même, elle n’est plus que l’instrument des demandes émanées de la sphère privée. Les institutions collectives sont discréditées, parce qu’elles sont toujours suspectes de ne pas prendre en compte les personnes concrètes. Sous couvert des mêmes règles, l’esprit du fonctionnement de la démocratie a complètement changé.

Néanmoins, la démocratie américaine se caractérise par des valeurs collectives très fortes : patriotisme et religion.

En effet. C’est, pour le coup, l’exception américaine : les Etats-Unis sont dotés d’une identité politique très forte et le pays où les libertés privées ont le plus de place. C’est fonction de la foi dans la « destinée manifeste » de l’Amérique et dans son rôle de puissance à l’échelle du monde. L’Etat-nation américain est projeté vers l’extérieur ; il n’organise pas la société à l’intérieur. C’est ce qui fait que la démocratie du privé coexiste avec une dimension publique axée sur le rayonnement des Etats-Unis. Les Européens, au contraire, ont abandonné toute politique de puissance et, dans leur démocratie sociale, le poids des institutions publiques est grand. Aussi chez eux l’irruption de la démocratie du privé est-elle très perturbatrice pour l’identité collective. Ils ne savent plus très bien où ils en sont. Autant, pour les Américains, la démocratie du privé se complète par un Etat tourné vers le dehors, autant, pour les Européens et en particulier pour les Français, elle se solde par l’incapacité d’assumer un héritage historique dont ils ne savent plus trop que faire, tout en y restant attachés.

La « démocratie du privé » s’accompagne d’une « oligarchisation » de la société, dites-vous, mais aussi d’une montée en puissance de la protestation. N’est-ce pas contradictoire ?

La démocratie du privé, ce n’est pas du tout le repli des gens dans leur foyer, le cocooning, la passivité : c’est l’alignement de chacun sur son intérêt d’individu et la légitimation absolue de celui-ci, donc de sa défense inconditionnelle. C’est dire que l’effervescence protestataire, la revendication et le contentieux sont garantis d’avance. Mais ces revendications campent sur leur particularité, en se plaçant à l’extérieur du politique. La protestation s’en remet en fait aux responsables et leur dit : « Voilà ce que nous voulons, débrouillez-vous pour trouver les moyens ». Le mot-clé est résister. Mais si vous ne formulez pas de propositions, si vous ne prenez pas en charge le point de vue de l’ensemble où votre réclamation doit s’inscrire, ce sont les gouvernants qui le font pour vous. Le problème de cette formule, c’est qu’elle ne permet pas de remonter au collectif. Elle exige, mais délègue aux hommes politiques le soin de décider : ainsi, la protestation sécrète naturellement l’oligarchisation. Du reste, le personnel politique s’accommode de la situation. Il a compris que si elle est parfois inconfortable, elle lui laisse les cartes bien en main. Le divorce entre le haut et le bas se creuse. Car les citoyens continuent dans le même temps d’aspirer à une grande politique. On a vu à l’occasion de la dernière élection présidentielle que leur attente était intacte. Les électeurs aspirent à une puissance du politique que toute leur pratique au quotidien a pour effet de rendre impossible. D’où le sentiment général d’une dépossession incompréhensible."


Je vous laisse réfléchir à ça, et rebondis maintenant sur le cliché avancé par MM. Joffrin et Aeschimann : "la démocratie américaine se caractérise par des valeurs collectives très fortes : patriotisme et religion.", cliché que Marcel Gauchet reprend mollement à son compte, évitant de parler de religion.

Je n'étais quant à moi pas si convaincu que les Etats-Unis soient si patriotes et si religieux que cela, ou du moins me posais des questions sur ce « patriotisme » et sur cette « religion », et ai donc été ravi de tomber sur ces lignes de Paul Yonnet :

"La religion s'est retirée du quotidien et du permanent des sociétés développées, des sociétés opulentes (c'est d'ailleurs à cette condition qu'elle est encore supportée) ; elle n'est plus qu'un restant des temporalités sociales, le plus souvent une sorte d'occupation du temps libre, autrement dit un loisir un peu plus grave qu'un autre."

A la fin de l'incise entre parenthèses se trouve un appel de note, qui débouche sur ceci :

"Tel est bien l'enjeu de l'affrontement entre les sociétés opulentes et l'islam « fondamentaliste ». Les Etats-Unis sont souvent présentés comme un pays religieux, ou, à tout le moins, comme « le plus religieux » des pays sécularisés. C'est là une erreur d'analyse provoquée par une illusion d'optique qu'ont d'ailleurs décryptée ses adversaires, qui y voient au contraire l'image d'un monde renversé. Sur ce point, les Etats-Unis ne sont pas fondamentalement différents de l'Europe : la Constitution américaine est laïque ; la prière a été supprimée dans les écoles ; il n'est fait allusion au « créateur », sans précision, que dans la déclaration d'Indépendance rédigée par Jefferson (lui-même d'ailleurs peu religieux). La véritable religion des Américains, ce qui les relie entre eux de manière sacrale, première et organisatrice, c'est l'économie (et son marqueur en régime capitaliste : l'argent), que le culte de la liberté, dont la liberté religieuse n'est qu'un des volets, est chargé de satisfaire. L'apport des Etats-Unis à la civilisation n'est ni littéraire, ni philosophique, ni artistique : il se résume à la consommation de masse, qui a révolutionné la planète. Aux Etats-Unis, pays d'élection du manichéisme moderne (et donc des croisades « contre le mal »), les religions sont un accessoire fonctionnel de l'économie. La société américaine est la société où se déploie avec le plus de radicalité, d'explosivité, le vertige post-religieux, dans une dynamique de non-retour au caractère absolu. On peut penser que cette dynamique va nourrir une opposition à son image, aussi violente et radicale, dont l'islam fondamentaliste ne représente qu'une des formes possibles." (La montagne et la mort, Fallois, 2003, pp. 194-95. Ouvrage soit dit en passant scandaleusement épuisé.)

Le lecteur de la Diatribe d'un fanatique aura reconnu dans cette dernière phrase l'« Islam de synthèse » qu'y évoque Jean-Pierre Voyer. Je m'étais de mon côté demandé, lors de l'une des dernières manifestations d'opposition à la « dynamique américaine », juste avant la crise, la réaction russe à l'agression géorgienne, si l'on ne risquait pas aussi d'avoir affaire à des « patriotismes de synthèse », des patriotismes de l'ère de la mondialisation empruntant des traits identitaires forts aux anciennes nations, mais de façon superficielle. Les contradictions françaises en ce moment, et notamment les contradictions de notre président, fournissent à cet égard un beau sujet de réflexion, que nous essaierons d'approfondir dans les suites de notre Apologie.

Quoi qu'il en soit, revenons à la thèse de P. Yonnet, et commençons par approuver sans réserve, au moins d'un point de vue sociologique, sa définition de la religion : « ce qui relie [les gens, ici les Américains] entre eux de manière sacrale, première et organisatrice ». Il faut partir de là, effectivement, Durkheim forever, pour ne pas se laisser prendre par le cliché des Etats-Unis comme fondamentalement (sic ?) religieux, et ne pas confondre la cause et l'effet. Simplement, P. Yonnet ne définit pas le terme « économie ». Ce qui est regrettable, car il nous semble précisément que ce qu'il entend ici par ce terme commode, sans s'y attarder, est précisément quelque chose qui, Voyer forever, n'existe pas. Attention, ce n'est pas une fiction, un mythe, un mensonge... ou c'est un peu de tout ça, mais pas uniquement. L'« économie » ici, n'est pas un mode d'activité séparé du reste de l'existence, n'est pas - certainement pas ! - une science, et n'est pas, ou pas seulement, une classe de faits : l'« économie » n'est finalement que cette curieuse sanctification collective de l'intérêt personnel, « dont le marqueur en régime capitaliste, est l'argent », - autrement dit, la sanctification par la collectivité elle-même de ce qui, à terme - ma main invisible dans ton cul -, ruine toute forme de collectivité. Les Etats-Unis sont un serpent qui se mord la queue (et la nôtre au passage, voilà des polyglottes, voilà des cosmopolites !). C'est un paradoxe que, Dumont forever, j'ai souvent relevé au sujet des sociétés modernes, il est difficile de fonder une collectivité sur le refus du collectif, et P. Yonnet a raison de dire que les Américains sont l'avant-garde « radicale » de ce mouvement.

Dans cette optique la religion et le patriotisme que l'on évoque à tout bout-de-champ à l'endroit des Américains (rappelons Godard : « ce peuple dont les habitants n'ont pas de nom ») ne sont pas tant des leurres ou des hypocrisies que des contrepoids nécessaires, les contrepoids holistes, ou en principe holistes, disponibles à l'époque de la fondation des Etats-Unis. Ils viennent en second, mais « tout en second » (je suis contre les femmes, « tout contre ») : ce n'est pas la superstructure par rapport à l'infrastructure, c'est un complément d'infrastructure à une infrastructure mal foutue, pour colmater une brèche dont on est soi-même responsable, c'est la réparation d'une fondation défaillante, au moment même où on la pose. Si vous voulez faire du vélo avec un pneu crevé, vous mettez de la rustine : celle-ci n'est pas de la superstructure ou du mythe, elle est nécessaire, mais seulement parce qu'à l'origine le pneu a un trou. En montant votre meuble Ikea, si votre vis n'est pas tout à fait droite, vous allez l'enfoncer d'autant plus, quitte à maltraiter le bois, pour que ça tienne quand même. Dernière analogie, un peu moins rigoureuse mais adaptée au contexte : on met plus de sauce, de sel ou de ketchup sur de la mauvaise viande que sur de la bonne.

A cette religion et à ce patriotisme on peut ajouter le conformisme (terme d'origine protestante, je le rappelle) qui a toujours frappé les observateurs - conformisme qui a partie liée avec le manichéisme évoqué par P. Yonnet : s'il faut se plier à la pensée dominante parce que c'est, in fine, une question de vie ou de mort pour la communauté, cela n'encourage pas la nuance. Il en est ici des collectivités comme des particuliers : ce sont ceux qui se sentent sûrs de leur force qui peuvent se permettre de douter.

Sur ma lancée et quitte à être schématique je verrais bien dans cette même hantise des conséquences destructrices de l'individualisme l'origine de la fameuse « tolérance » américaine, qui frappait tant Tocqueville : on peut avoir la religion que l'on veut, mais il faut en avoir une (ce fut d'ailleurs, ici, l'erreur de l'Europe : croire que l'on pouvait impunément se foutre sur la gueule pendant des décennies entre européens, que l'unité de la « Chrétienté » était tellement forte qu'elle se referait d'elle-même après. Orgueil tragique !). Traduit en termes sociologiques à la Dumont : les principes individualistes font que l'on est obligé de tolérer la religion des autres, mais la peur de la dissolution de la société dans et par l'individualisme fait que chacun est requis de proclamer sa soumission à des valeurs religieuses - collectives dans leur formulation, même si, donc, dans la pratique, individuelles. L'athée n'est qu'un individualiste parmi d'autres (et même, comme le dit P. Yonnet p. 193 de La montagne et la mort, « l'agnostique de tendance tragique » peut être plus sensible à la décadence du religieux traditionnel qu'un croyant), mais, dans le contexte - guerres de religion, protestantisme... - qui vit la naissance des Etats-Unis, il franchit la ligne jaune.

Un exemple peut clarifier les choses : dans les derniers épisodes diffusés par Canal +, à l'heure où j'écris, de la saison 5 de Desperate housewives, on assistait à d'émouvantes scènes entre la chère Bree Van de Kamp, très croyante, limite fondamentaliste, et son fils pédé. On peut formuler les choses aisément, et c'est sans doute ainsi que les scénaristes l'ont fait à leur propre usage : la tension entre les valeurs traditionnelles et les valeurs modernes, dépassée par l'amour maternel et l'amour filial. Mais on voit bien en réalité que le personnage de la mère a beau respecter les valeurs traditionnelles, au premier rang desquelles les valeurs familiales, donc baigner dans un climat holiste, elle ne le fait qu'à titre personnel, que comme un choix personnel, individuel - que d'ailleurs elle proclame comme tel. Rien donc en réalité n'autorise la mère à critiquer son fils : elle a choisi sa religion, il a « choisi » sa sexualité, chacun fait ce qu'il veut du moment qu'il ne nuit pas à la collectivité, et c'est cela en dernière analyse qui leur permet de trouver un terrain d'entente. De même, que le fils en question veuille se marier ne doit pas être mal interprété : ce qui importe ici n'est pas tant qu'il respecte la famille, même si ce n'est pas négligeable, mais qu'il montre ainsi sa stabilité personnelle.

"C’est, pour le coup, l’exception américaine : les Etats-Unis sont dotés d’une identité politique très forte et le pays où les libertés privées ont le plus de place", dit Marcel Gauchet. Je ne le chipoterai pas sur une formulation peut-être rapide au milieu d'un entretien oral, mais si exception il y a, il n'y a pas paradoxe, encore moins contradiction. Les « libertés privées » ont précisément tant de place aux Etats-Unis (au moins en principe), qu'il faut à ce que j'avais appelé un jour, par analogie avec « l'entité sioniste », « l'entité protestante », une « identité politique très forte » pour que ces libertés privées ne fassent pas tout partir en eau de boudin. On peut d'ailleurs considérer que le bushisme a été une illustration caricaturale, sur le mode du pompier pyromane, de cette dynamique : laissée à elle-même par la disparition de l'ennemi communiste, la « société » américaine est très vite partie en vrille dans les années 90, où plus que jamais il ne s'est agi que d'une chose, se bâfrer. Quelle qu'ait été la réalité factuelle de ce qui s'est passé le 11 septembre 2001, G. W. Bush a cru pouvoir le prendre pour base afin de reconsolider cette société, sans comprendre, ou sans vouloir admettre, étant donnée son idéologie propre, que le cancer individualiste était déjà trop avancé pour que ce remède traditionnel puisse véritablement fonctionner. Au contraire, le remède a empêché de voir quelle était la réelle gravité du mal.

(Exemplaire, de ce point de vue, l'actuelle crise mexicaine : cela fait des années que les Etats-Unis ne maîtrisent plus du tout leur frontière sud, que l'immigration clandestine y revêt des formes délirantes, avec, pour parler comme M. Defensa, un fort potentiel de déstructuration, et dans l'ensemble, pendant huit ans, G. W. Bush n'y a rien fait, préférant se concentrer sur des pays lointains. A l'arrivée, le retour de bâton est sévère. Même le Hezbollah se paie sur la bête, paraît-il, qui profite de la porosité de cette frontière pour infiltrer les Etat-Unis.)

On pourrait continuer sur ces thèmes, et notamment le rapport à l'espace, la notion, justement, de « frontière » (de « nouvelle frontière » chez Kennedy ; et n'oublions pas les investissements du fils Bush dans « la conquête de l'espace »). Je ne sais pas à quel point on peut qualifier de nation les Etats-Unis, je ne sais pas, d'autre part, si des sécessions les attendent de la part des Etats les plus riches, qui à tort ou à raison semblent considérer en ce moment qu'ils n'ont pas à payer pour les autres, mais il est clair que le rapport au territoire n'est pas le même aux Etats-Unis que chez les vieilles nations. Encore une fois leur comportement, incroyablement impérialiste, lors de la chute de l'URSS, chez le père Bush et chez B. Clinton, le montre sans ambiguïté : le monde avait alors vocation à devenir américain. (Et une partie de ce monde a dit oui ! - Et continue à le faire...) Mais il faut bien voir, malgré des similitudes de discours « civilisateurs », la différence entre cet impérialisme et celui des puissances européennes à la fin du XIXe siècle. Celles-ci partaient de leur territoire ancestral pour conquérir des pays eux-mêmes anciens (la Chine) ou des contrées « sauvages », en tout cas des zones étrangères à leur sphère d'influence traditionnelle, alors que pour les Américains il s'est agi de continuer l'expansion qui depuis l'origine est la leur et qui, pour différentes raisons, s'était interrompue entre 1929 et 1945, puis entre 1948 (stabilisation du bloc communiste) et 1989 (« chute du Mur ») - ce qui signifie que l'expansion du capitalisme américain à partir de la fin du XIXe siècle est partie intégrante, même si cela fit débat aux Etats-Unis eux-mêmes, de l'expansion américaine, qu'elle en fut déjà l'un des modes.

« US go home », martelaient les communistes, et d'autres, dans l'après-guerre - n'était-ce pas déjà une erreur de perspective, un malentendu entre « la vieille Europe » et son allié ? E.T. a un « home », les Américains beaucoup moins, en tout cas au niveau national (c'est peut-être pour ça qu'il veut à tout prix rentrer chez lui...).

Ce qui permet de rappeler d'ailleurs à quel point la crise de la politique étrangère américaine et la crise interne aux Etats-Unis sont liées, se nourrissent l'une l'autre, et préparent aux Américains de sévères remises en cause. Anglais et Français n'ont pas été heureux de perdre leur empire, ont géré ça plus ou moins bien (à l'occasion, en revenant sur Churchill, je vous montrerai que les premiers ne l'ont pas si fondamentalement mieux géré que nous), mais au moins savaient-ils ce qu'était leur territoire de base, sur quoi se replier, quels étaient leurs « fondamentaux ». Il n'est pas sûr qu'il en soit de même pour les Américains.


Restons-en là. La thèse, sociologique, est celle-ci : avant d'être patriotes ou religieux, les Etats-Unis sont le lieu de l'individualisme. C'est ceci qui explique cela. Et explique aussi peut-être, d'ailleurs, que nous insistions autant, en Europe, sur ces traits patriotes et religieux, pour nous cacher à nous-même ce qui pourtant saute aux yeux tous les jours, que l'individualisme, s'il n'est pas bridé par le holisme, a les mêmes effets destructeurs aux quatre coins de la planète.




durer-07


"Lui qui craignait la Révolution, il finissait par se rassurer en voyant que l'accident qui menaçait, c'était la Fin du Monde même, cataclysme si complet que devant lui toute crainte s'envolait et laissait la place à une sorte de goguenarde ébriété." (Gilles, deuxième partie, ch. I.)

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