Figures de la réciprocité et de la hiérarchie.
"Ton sentiment me fait gonfler mes voiles d'ange
Ton sentiment me fait du bien au sentiment
Et les fleurs du pavé poussent des cris étranges
Moi qui viens du pavé vers toi et me dressant
Et moi je ne te prends que ce que je te dois
Si je n'avais que du sentiment à t'filer
Il y a bien longtemps que tu m'aurais banni
De ton fief de ton cul de ta loi de tes langes
Il y a bien longtemps que tu te serais cassée"
"TU es moi
JE c'est toi
Comment t'appelles-tu ?
Tu t'appelles la nuit dans le ventre des filles
De ces filles qui roulent au bord de la mort lente
Tu t'appelles l'amour Tu es toutes les femmes
Tu es TOI tu es ELLES"
(Léo Ferré, Les amants tristes.)
"Ton style c'est ton cul c'est ton cul c'est ton cul
Ton style c'est ta loi quand je m'y plie salope !
C'est ta plaie c'est mon sang c'est ma cendre à tes clopes
Quand la nuit a jeté ses feux et qu'elle meurt
Ton style c'est ton cœur c'est ton cœur c'est ton cœur"
(Id., Ton style.)
Bernanos parle de la charité comme un moyen de connaissance. L'amour comme recherche de la vérité. Amour, c'est une partie de l'étymologie du mot philosophie. - D'une certaine façon - nous baignons ici dans Platon, tout en le prenant pour ainsi dire par-derrière - il est extraordinaire que nous puissions avoir une compréhension sexuelle de quelqu'un de l'autre sexe, dont nous ne pouvons imaginer, quelle que soit notre expérience sensuelle, ce qu'il [elle] éprouve. On dit parfois encore que les pédés ne sont pas normaux, mais ils sont normaux, ils sont logiques, platement logiques, et nous devrions au contraire être surpris de la persistance de l'hétérosexualité. Je m'étais opposé dans le temps à M. Maso sur ce sujet ("Les homosexuels s'imaginent qu'ils baisent."), mais c'est lui qui avait raison. Comment passons-nous de l'adoration fascinée mais un peu béate, voire stupide, pour les nichons et la foufoune, à la compréhension d'une femme ? Au fait de savoir, d'un savoir que rien ne peut mettre en doute, d'un savoir qui n'est pas sans rappeler la connaissance qu'a l'abbé Donissan des âmes dans Sous le soleil de Satan, que nous la comprenons ?
Cela fait longtemps que je me dis que Dieu n'existe pas, parce que l'homme après l'amour ne pense qu'à dormir, alors que la femme est réveillée. A toutes les différences entre les sexes j'ai pu trouver une raison, sous la forme d'une complémentarité supérieure : par exemple (et à gros traits), que les femmes aient un désir d'enfant plus fort que les hommes, évidence incontestable, permet à l'espèce de se reproduire ; que les hommes aient moins ce désir permet aux représentants de l'espèce de penser aussi au plaisir. Mais cette différence, qui crée tant de malentendus "dans le plus doux moment" (Jacques Demy), je ne lui avais pas trouvé de signification. Aujourd'hui, à tort ou à raison, je me dis que justement : il faut aussi une différence irréductible, une différence sans signification, pour que les deux sexes soient différents. Que cette différence soit prosaïque, voire triviale, ne change rien à l'affaire, il s'en faut. Le miracle est là : être non seulement complémentaires, mais différents, et parvenir néanmoins, de temps à autre, à se comprendre.
(Se comprendre... En toute rigueur, je n'en sais rien, ce sont les éventuelles lectrices qui peuvent confirmer ou non cette formule symétrique. Mais la compréhension dont je parle n'est-elle pas nécessairement réciproque ? - Jusqu'à quel point ?)
Depuis l'idée des Vingt Plus Belles Actrices (expliquée ici, vous pouvez ensuite suivre le "libellé" - et constater que je suis loin d'arriver à vingt), je garde pour la fin le portrait de Marilyn, que je ne pouvais me résoudre à attaquer, pensant que j'allais la souiller avec mes gros doigts de blogueur. Marilyn, c'est celle que nous aurions tous aimé faire jouir, la belle affaire ! Marilyn, c'est bien plus que ça : c'est la femme que nous voulons comprendre. Son air un peu bébête (que l'on retrouve chez BB), son éternelle jeunesse ajoutent à ce désir : il y a dans cette femme plantureuse une adéquation parfaite, non entre le naturel et le spirituel, car précisément nous nous situons ici à ces deux niveaux, mais entre le fini et l'infini, le désir de la posséder entraîne toujours avec lui la peur qu'elle ne s'échappe, que d'une manière ou d'une autre elle ne vous file entre les doigts. Phénomène idéal pour le star-system, dont elle restera toujours l'incarnation la plus achevée - et qu'en même temps (cette innocence, cette naïveté à la fois jouée et réelle, cette fragilité), c'est peut-être le plus beau cadeau qu'elle nous fait, sa distinction suprême, elle dépasse, pour nous « offrir » son mystère naturel et sincère.
- D'où son inépuisable photogénie : un livre contenant toutes les photographies de Marylin serait assurément une des grandes oeuvres d'art du XXe siècle. Je vous laisse y rêver par vous-mêmes, ici et là.
Après, pour en revenir à notre point de départ, on peut accorder une plus haute importance à la connaissance par la charité (autre composante du mythe Marilyn) qu'à la connaissance par la sexualité, qui certes n'est trop souvent que "l'infini à la portée des caniches". L'un n'empêche pas l'autre, dirons-nous pour conclure, avec un optimisme quelque peu forcé. Mais ne serait-il pas vain de reprocher à l'exceptionnel d'être rare ?
Libellés : Bardot, Bernanos, Céline, Cormary, Demy, Ferré, Keaton, Les vingt plus belles actrices, Marylin, Moi, Platon
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