La charrue, les boeufs, le Beyle.
Où l'on constate une fois de plus que les romanciers peuvent être nettement plus synthétiques que la très grande majorité des philosophes. J'avais complètement oublié ce codicille au Rouge et le Noir, judicieusement placé pleine page par les éditeurs (fans de Bourdieu, c'est amusant, on se croirait parfois sur Acrimed) de la nouvelle édition "Pléiade" (2005, p. 807) :
"L'inconvénient du règne de l'opinion, qui d'ailleurs procure la liberté, c'est qu'elle se mêle de ce dont elle n'a que faire ; par exemple, la vie privée. De là la tristesse de l'Amérique et de l'Angleterre. Pour éviter de toucher à la vie privée, l'auteur a inventé une petite ville, Verrières, et, quand il a eu besoin d'un évêque, d'un jury, d'une cour d'assises, il a placé tout cela à Besançon, où il n'est jamais allé."
Dans les deux premières phrases défilent, entremêlées, des réminiscences de Girard (ce qui est tout de même logique, puisque c'est à la suite de la découverte de Mensonge romantique et vérité romanesque que j'ai décidé de relire ce roman de Stendhal), Voyer (cette "liberté" en italiques...), Muray (qui y verrait une dimension anti-protestante) - et Tocqueville, mais en mieux.
Soit trois des cinq auteurs contemporains recommandés dans ma Présentation générale. La classe ! J'ai d'ailleurs réalisé, puisque l'on parle de l'Amérique, que quatre de ces cinq auteurs (Girard et Muray, Descombes et Dumont), y avaient vécu et/ou travaillé. Comme disait l'autre, si les Ricains n'étaient pas là... Voilà de l'échange culturel, voilà de l'internationalisme.
J'étais parti sur Stendhal... Oui : je retrouve aussi dans cette notation d'un auteur au sujet duquel les éditeurs nous disent avec apparence de raison que "toute sa vie, [il] s'est efforcé de démontrer, contre la tradition, que le caractère était un produit social" (p. 972), une délicieuse intuition sociologique, qui en toute logique, comme je l'ai rappelé récemment, débouche sur de la bonne psychologie, et non l'inverse. Ce que confirment de leur côté MM. Pléiade :
"Le lecteur de 1880 (Barbey d'Aurevilly, Paul Bourget, Hippolyte Taine, Zola, Nietzsche) a fait de Stendhal un pénétrant analyste du coeur humain. Nul ne songerait à nier que l'auteur de la Chartreuse ne soit un expert de l'intime et de l'âme, mais si Stendhal est un grand "psychologue", c'est, sinon par accident, du moins par ricochet. Car la psychologie n'est nullement l'objet premier d'un auteur, qui, toute sa vie, s'est efforcé de montrer, contre la tradition, etc."
Et comme il y a vraiment peu de hasard, en recherchant dans Reich, mode d'emploi (J.-P. Voyer, 1971), si la première partie, sur la notion de caractère, ne pouvait me fournir une conclusion appropriée, je tombe, en exergue, sur une citation, fort girardienne d'esprit, de Stendhal. Mon monde est petit ! Je vous y laisse donc, en compagnie du stendhalien Reich, et en me citant outrageusement moi-même pour finir :
Est-il possible, est-il sain, est-il recommandé, et est-il bon pour la santé, de psychanalyser un musulman ?
Bon ramadan à tous !
"L'inconvénient du règne de l'opinion, qui d'ailleurs procure la liberté, c'est qu'elle se mêle de ce dont elle n'a que faire ; par exemple, la vie privée. De là la tristesse de l'Amérique et de l'Angleterre. Pour éviter de toucher à la vie privée, l'auteur a inventé une petite ville, Verrières, et, quand il a eu besoin d'un évêque, d'un jury, d'une cour d'assises, il a placé tout cela à Besançon, où il n'est jamais allé."
Dans les deux premières phrases défilent, entremêlées, des réminiscences de Girard (ce qui est tout de même logique, puisque c'est à la suite de la découverte de Mensonge romantique et vérité romanesque que j'ai décidé de relire ce roman de Stendhal), Voyer (cette "liberté" en italiques...), Muray (qui y verrait une dimension anti-protestante) - et Tocqueville, mais en mieux.
Soit trois des cinq auteurs contemporains recommandés dans ma Présentation générale. La classe ! J'ai d'ailleurs réalisé, puisque l'on parle de l'Amérique, que quatre de ces cinq auteurs (Girard et Muray, Descombes et Dumont), y avaient vécu et/ou travaillé. Comme disait l'autre, si les Ricains n'étaient pas là... Voilà de l'échange culturel, voilà de l'internationalisme.
J'étais parti sur Stendhal... Oui : je retrouve aussi dans cette notation d'un auteur au sujet duquel les éditeurs nous disent avec apparence de raison que "toute sa vie, [il] s'est efforcé de démontrer, contre la tradition, que le caractère était un produit social" (p. 972), une délicieuse intuition sociologique, qui en toute logique, comme je l'ai rappelé récemment, débouche sur de la bonne psychologie, et non l'inverse. Ce que confirment de leur côté MM. Pléiade :
"Le lecteur de 1880 (Barbey d'Aurevilly, Paul Bourget, Hippolyte Taine, Zola, Nietzsche) a fait de Stendhal un pénétrant analyste du coeur humain. Nul ne songerait à nier que l'auteur de la Chartreuse ne soit un expert de l'intime et de l'âme, mais si Stendhal est un grand "psychologue", c'est, sinon par accident, du moins par ricochet. Car la psychologie n'est nullement l'objet premier d'un auteur, qui, toute sa vie, s'est efforcé de montrer, contre la tradition, etc."
Et comme il y a vraiment peu de hasard, en recherchant dans Reich, mode d'emploi (J.-P. Voyer, 1971), si la première partie, sur la notion de caractère, ne pouvait me fournir une conclusion appropriée, je tombe, en exergue, sur une citation, fort girardienne d'esprit, de Stendhal. Mon monde est petit ! Je vous y laisse donc, en compagnie du stendhalien Reich, et en me citant outrageusement moi-même pour finir :
Est-il possible, est-il sain, est-il recommandé, et est-il bon pour la santé, de psychanalyser un musulman ?
Bon ramadan à tous !
Libellés : Barbey, Bourdieu, Descombes, Dumont, Girard, Nietzsche, Stendhal, Taine, Tocqueville, Zola
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