lundi 12 septembre 2011

Redonner un sens plus pur à ce qui reste de mots à ce qui reste de la tribu.

hitler-phone


"La seule manière de rejoindre autrui en profondeur, c'est de s'occuper de soi et uniquement de soi, de ce qu'il y a de plus profond en soi. Les « altruistes », les philanthropes, les esprits « généreux » ne comprennent et n'aident réellement personne ; ce sont des gens qui ont de l'énergie à dépenser, c'est tout." - Cioran, 1965.

Comme souvent avec l'Emil, c'est à la fois vrai et inexact. L'un n'empêche pas l'autre, serait-on tenté de lui répondre, tout en admettant sans problème que ceux qui s'occupent des autres sans s'occuper de soi non seulement, effectivement, ne comprennent personne, mais en plus font chier tout le monde.

Une autre pour la route, du même, la même année :

"Le français est une langue dont la sève s'est tarie ; c'est pourquoi, poème, roman, philosophie, tout y apparaît comme un exercice, comme un tour de virtuose." - Et après la virtuosité, le vide - après Foucault et Deleuze, Lévy ; après Sarraute et Robbe-Grillet, Lévy - ça y est, je redeviens antisémite, et injuste en plus sur le second Lévy, ce genre de conneries à l'eau de rose a toujours existé, ou du moins existe depuis longtemps.

Cela fait quelques décennies maintenant que la France sait qu'elle doit céder la place, à tous les niveaux. Le domaine « intellectuel » a résisté un peu plus longtemps que les autres, non certes, comme Cioran l'avait perçu, sans frime ni esbroufe : avec les moyens du bord.

Céder la place, ce n'est jamais agréable. Ceci dit, les Français, "le peuple le plus collabo de la terre", comme disait Nabe (en une phrase souvent citée par L. James), seraient tout à fait prêts - quitte à crier un peu, telle une domestique que l'on trousse... - à se jeter dans les bras d'un nouveau maître, après l'Allemand et l'Américain, mais le monde actuel est ainsi fait que le nouveau maître a un peu de mal à apparaître.

"Une nation n'est qu'une langue", rappelait Joseph de Maistre. Pour retrouver l'esprit de la première citation de Cioran tout en réfléchissant sur la seconde, on serait tenté de dire que ce sont ceux qui travaillent à redonner de la « sève » à la langue française qui font le plus pour la nation - dans un sens large, plus large que l'État-nation ou la Patrie -, quitte à travailler dans leur coin, pour eux-mêmes, pour « soi et uniquement [pour] soi ». Non seulement ils ont quelque chance de « rejoindre autrui en profondeur », mais ils peuvent permettre indirectement à d'autres « autrui » de se « rejoindre en profondeur » (honni soit qui mal y pense...).

De ce point de vue, quelqu'un comme Nabe peut dire tout le mal qu'il veut de la France et des Français, il sera toujours plus proche de ceux-ci et de celle-là en écrivant dans son style propre, que n'importe quel cocardier dont le seul moyen d'expression est une prose boursouflée dont, justement, la « sève s'est tarie » il y a déjà bien longtemps.

- Ce qui n'est nouveau ni par rapport à M.-É. N. ni par rapport aux connards cocardiers, il suffit de repenser, entre autres, à quelqu'un comme Mallarmé.


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