lundi 5 juin 2006

Une vérité sur les émeutes.

"L'explosion des banlieues exprime aussi une révolte anarchique, mais authentique et tragique, en provenance de peuples d'outre-mer encore assez sains pour ne pas tolérer sans réagir l'avilissement de l'espèce. Pendus comme ceux des autres à la télévision, leurs enfants ressentent obscurément, mais intensément, tout ce qu'elle détruit, avilit de leurs valeurs ancestrales. Parce qu'ils touchent encore de plus près un héritage archaïque, ils en ressentent d'autant plus douloureusement les blessures. D'une certaine façon, ils hurlent, ils cassent, parce qu'ils refusent la déshumanisation du monde moderne, véhiculée par une idéologie où chacun vénère la démocratie mais regarde Star Academy. (...) L'immigration a transplanté aux périphéries de nos villes des peuples restés encore très traditionnels. Ils y subissent depuis trente ans l'agression d'un modernisme destructeur sous toutes ses formes, à commencer par la permissivité et la domination de l'argent. Si la droite clabaudeuse avait été autre chose que ce qu'elle est, c'est-à-dire un ramassis de petits bourgeois bruyants mais apeurés, c'est là qu'elle aurait envoyé des missionnaires, afin d'y lever des secours."

Gilbert Comte, in Eléments, n°120, printemps 2006.

Ce diagnostic me rappelle... le mien, quand j'avais essayé de montrer, que, même du fond de sa bêtise, A. Finkielkraut pouvait avoir mis le doigt sur quelque chose d'intéressant quant à l'aspect "religieux" des émeutes. Mais il s'agissait alors tellement soit de le condamner soit de prendre sa défense, que l'idée qu'il ait pu soulever un problème intéressant au milieu d'un fatras de sentencieuses conneries ne semble pas avoir eu d'échos.

Ce n'est pas la première, ni même la deuxième fois que je cite Eléments ou son saint patron Alain de Benoist. Je conseille d'ailleurs, pour qui aura la chance de le trouver, le dernier numéro de cette éclectique revue, lequel est notamment consacré au cinéma français - ceux qui comme moi ont éprouvé un étrange parfum d'ennui à la vision de Rois et reine, auront, grâce au subtil M. Cinéma, les idées plus claires à ce sujet.

Ceci posé, il ne faudrait pas en conclure que tout dans la "Nouvelle Droite" emporte mon adhésion. En particulier, les velléités païennes de ce mouvement me laissent pour le moins de marbre. (Je constate d'ailleurs une nouvelle fois que Eléments, dans ce numéro 120, rend hommage à Muray sans évoquer son catholicisme - le diable et le stalinisme sont vieux). Mais je remets à plus tard une analyse sérieuse de ce qui peut rapprocher et éloigner le café du commerce de la nouvelle droite - il se trouve justement que cela nous renvoie entre autres à Max Weber, au supposé "désenchantement du monde", aux supposées théodicées rationalisatrices des religions monothéistes, voire même à la distinction jugements de fait - jugements de valeur, etc. Plus on bosse, et plus il y a du boulot.

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