dimanche 31 mars 2019

La bâtarde.

Je n’ai jamais lu une ligne de Violette Leduc et me garderai donc bien de la juger en tant qu’écrivain. Ceci posé, tombant tout à l’heure, suite à un enchaînement d’associations d’idées, sur la fiche Wikipedia qui lui est consacrée, je me suis dit qu’il était tout de même curieux que l’on nous présente parfois comme des héros des gens dont la vie est « officiellement » résumée ainsi : 

"Violette Leduc est née à Arras le dimanche 7 avril 1907 (déclarée le 8), à cinq heures du matin, fille illégitime de Berthe Leduc et d'André Debaralle, un « fils de famille » de la haute bourgeoisie de Valenciennes. Il refuse de reconnaître l'enfant. Dès son enfance, elle est marquée par la honte de sa naissance. Violette est interne au collège de Valenciennes, puis dans celui de Douai où elle fait la connaissance d'Isabelle P. avec qui elle a une relation d'amour passionnée. Violette Leduc connaît également, à cette époque, ses premières passions littéraires : les classiques russes, puis Cocteau, Duhamel, Gide, Proust et Rimbaud. En 1925, Denise Hertgès (Cécile dans Ravages et Hermine dans La Bâtarde), surveillante au collège de Douai et fine musicienne, devient son amante. Leur relation est découverte. Le scandale éclate et les deux jeunes femmes sont renvoyées de l’établissement.

En 1926, Violette accompagne sa mère et son beau-père à Paris et poursuit ses études secondaires au lycée Racine. Elle rate son baccalauréat et décide d'abandonner ses études pour gagner sa vie. Violette et Denise vivent ensemble pendant neuf ans dans des hôtels meublés de la banlieue parisienne. Elle devient échotière chez Plon, où elle rencontre de nombreux écrivains. Après avoir été quittée par Denise, Violette entre en 1936 chez Synops comme scénariste, y rencontre en mai 1938 Maurice Sachs, écrivain aventurier homosexuel, futur auteur du Sabbat, dont elle tombe éperdument amoureuse. En 1939, elle est secrétaire pour la Nouvelle Revue Critique, maison d'édition dirigée par les frères Keller, où elle restera un an, jusqu'à la déclaration de la guerre. 

Elle épouse en 1939 Jacques Mercier, un ancien ami, photographe de mariages et peintre à ses heures, mais le couple, installé au 20, rue Paul-Bert (Paris XIe), se sépare au bout d'un an. Violette se fait avorter à cinq mois et demi de grossesse et frôle la mort. Cette expérience dramatique est longuement décrite dans Ravages. En 1940, recommandée par Sachs, elle collabore à la revue Pour Elle et au quotidien Paris-Soir. En 1942, elle s'installe pendant trois mois dans un village de Normandie, Anceins, près de L'Aigle où, sur l'injonction de Maurice Sachs, qu'elle aime d'un amour impossible, elle commence à écrire ses souvenirs d'enfance, dans L'Asphyxie, sa fameuse première phrase (« Ma mère ne m'a jamais donné la main ») déclenchant tout le reste. Elle survit grâce à ses petits trafics de marché noir. En 1944, elle découvre L'Invitée de Simone de Beauvoir et comprend la composante homosexuelle de son auteur. En février 1945, par l'entremise de deux amies, Violette Leduc est présentée à Simone de Beauvoir qui accepte de lire le manuscrit de L'Asphyxie. D'emblée Beauvoir reconnaît son talent. Dès lors, elle suivra son travail et la soutiendra jusqu'à la fin. Des extraits du manuscrit paraissent dans Les Temps modernes. En mai 1946, L'Asphyxie sort chez Gallimard dans la collection « Espoir » dirigée par Camus. Le livre ne connaît aucun succès, mais Violette Leduc gagne l'estime de Jean Cocteau, Jean Genet, Marcel Jouhandeau, Nathalie Sarraute et Jean-Paul Sartre.

Éprise de Simone de Beauvoir, elle entame la rédaction de L'Affamée, poème en prose, journal onirique d'une amoureuse, consacré à sa passion pour le Castor, nommée « Elle » tout au long des pages. Violette Leduc se lie d'amitié avec Colette Audry et surtout Nathalie Sarraute. En septembre 1947, grâce à Genet qu'elle admire, elle rencontre Jacques Guérin, bâtard comme elle, riche industriel (il dirige les parfums d'Orsay), collectionneur de livres rares, de manuscrits, d'œuvres d'art, ami d'artistes et d'écrivains. Elle s'éprend de cet homme qui ne peut répondre à ses élans : comme Sachs, Guérin est homosexuel. Il admire l'œuvre de Violette et lui apportera son fidèle soutien pendant les dix-sept années de leur amitié. En 1948, il fait publier à ses frais, chez Jean-Jacques Pauvert (Éditions du Palimugre), une édition de luxe de L'Affamée qui sort la même année chez Gallimard. Elle commence la rédaction de Ravages, son premier roman. En 1949, Sartre et Beauvoir versent une petite pension à Violette Leduc par l'intermédiaire des Éditions Gallimard afin de ménager la sensibilité de leur obligée. En 1954, grâce au prix Goncourt obtenu pour Les Mandarins, Simone de Beauvoir assumera seule cette charge. En 1954, Leduc est victime de la censure éditoriale : Gallimard ôte les cent cinquante premières pages de son roman Ravages. L'auteur y décrivait dans un style imagé, mais aussi avec une exactitude d'entomologiste, les ébats passionnés de deux collégiennes, Thérèse et Isabelle. En 1955, Ravages sort amputé de son début et Jacques Guérin publie un tirage restreint (28 exemplaires) de cette partie censurée par l’éditeur.

En 1956, elle séjourne six mois dans une clinique de Versailles pour soigner ses tendances paranoïaques puis, en 1957 six mois dans une maison de repos, « La Vallée-aux-Loups » à Châtenay-Malabry.

En 1961, grâce à une amie écrivain, Thérèse Plantier, elle découvre Faucon et s'y réfugie pour continuer la rédaction de La Bâtarde, une autobiographie romanesque, qui, commencée en 1958, paraît en 1964, avec une longue et dithyrambique préface de Simone de Beauvoir. Le succès est immédiat, le livre est vendu à 170 000 exemplaires. Il est pressenti pour le prix Goncourt. Violette Leduc a 57 ans au moment de son succès littéraire. Pour lui donner une totale indépendance, Beauvoir exige le remboursement des sommes qu'elle lui versait depuis 1949. Cette décision a pour but de mettre Violette sur un pied d'égalité et de lui permettre de s'acquitter ainsi de ses complexes d'infériorité.

Elle continue à publier et rencontre chaque fois un grand succès d'estime, parfois aussi commercial (Thérèse et Isabelle), et mène, avec parcimonie, une vie quelque peu mondaine. De nombreux journaux lui demandent des articles. Elle s'installe de longs mois dans la maison qu'elle a achetée et fait restaurer à Faucon.

En 1970, elle publie La Folie en tête que Simone de Beauvoir a auparavant fortement censuré, tant certains passages lui semblaient emphatiques et impudiques. A l’occasion de la sortie du livre, Violette Leduc est interviewée dans l’émission Vie littéraire de la RTS. Elle évoque ceux qui ont marqué sa vie: Maurice Sachs et Simone de Beauvoir. Elle revient sur les circonstances de la querelle qui l'a brouillée avec Jean Genet.

Violette a un cancer du sein et décide de s'installer définitivement à Faucon dans sa maison rénovée. Elle continue à écrire malgré l'aggravation de la maladie et meurt chez elle le 28 mai 1972 en présence d'un ami.

Simone de Beauvoir est nommée héritière de ses droits littéraires et publie La Chasse à l'amour en 1973.

Violette Leduc, l'une des pionnières de l'autofiction, a fait de sa vie la matière principale de ses livres. L'apparente simplicité de son style, sa musique particulière leur donnent un ton vrai, personnel et très attachant."


(En espérant que ses livres ne ressemblent pas à du Ernaux ou du Angot…)

samedi 30 mars 2019

"Anatomiquement, culturellement et sexuellement, les seins, c’est la femme, et leur réalité saute aux yeux de tout mâle normalement constitué."





Je recopie cette phrase innocente et m’aperçois que, dans le contexte délirant actuel, certains auraient envie d’en contester les termes. Les seins construction sociale ? Je reprends : 

"Anatomiquement, culturellement et sexuellement, les seins, c’est la femme, et leur réalité saute aux yeux de tout mâle normalement constitué. La poitrine, ce n’est jamais que l’ensemble de la cage thoracique. Pas de quoi en faire un plat, sauf quand elle est fumée - la seule dérive un peu cochonne qu’on puisse lui accorder. La poitrine, ce fut aussi la funeste association avec la tuberculose pulmonaire, qui engendra bien des phtisiques à qui Simenon trouvait toutefois du charme : « Il avait cette séduction de certains poitrinaires, des traits fins, une peau transparente, des lèvres sensuelles. » Chacun son truc…

Bref, la fonction érotique de la femme trouve son épicentre au bout des seins. Mais aussi sa fonction affective. Quand elle est mère, elle donne le sein et la maternité ne vient pas par l’opération du Saint-Esprit, sauf pour la Sainte Vierge. Notons que les textes sacrés, loin d’être bégueules, se montrent joyeusement prolixes quant au sein : le sein de Dieu, le sein de la terre, le sein des fidèles, le sein de l’Église (dont il ne fait pas bon d’être banni !), et même celui de la Vierge. Mais ces seins-là ne vont pas de pair, ni par paires. Imaginez le scandale si l’on parlait des seins de la Vierge. Les gros bonnets du Vatican ne manqueraient pas de nous remonter les bretelles ! Quand un problème de poitrine devient un problème de foi…"

J.-L. Chiflet, merci pour lui. 

vendredi 29 mars 2019

Énonciation et provocation.

Chestertonien un jour, chestertonien toujours ? En tout cas, chestertonien ce jour. G. K. évoque une thèse de son ami H. Belloc, à qui certains protestants reprochent de professer "l’horrible opinion [selon laquelle] la Réforme protestante fut le naufrage de la chrétienté", et enchaîne ainsi, avec son talent personnel pour la logique et l’énoncé de propositions générales à travers un modèle précis :  

"Personnellement, j’aurais pensé qu’il était évident à quiconque, de quelque bord qu’il soit, qu’il s’agissait concrètement et objectivement du naufrage de la Chrétienté. Par exemple, je suppose que ce serait une évidence pour quiconque désire ou même débat de la réunification du monde chrétien. Il y eut assurément un vaisseau ou un véhicule uni, qui s’est tout aussi certainement brisé en plusieurs morceaux. Sans doute certains pensaient-ils que le navire était un trois-mâts archaïque aux planches pourries, dont l’éclatement était inéluctable, et que ceux qui en réchappèrent sur des chaloupes furent chanceux. Mais ce qui est sûr, c’est que le navire s’est bel et bien brisé et que les embarcations rescapées étaient différentes du vaisseau d’origine. L’on pourrait aussi bien nous tenir grief de penser que l’émergence des royaumes féodaux et des nationalités modernes est liée au déclin et à la chute de l’Empire romain. 

Ce n’est là qu’un symptôme de bigoterie, mais qui mérite une remarque en introduction. L’une des particularités de ce genre de bigoterie est son impossibilité à distinguer provocation et énonciation de faits implacables. Si je dis que la Réforme fut une rechute dans la barbarie, un retour à tout ce qu’il y avait de pire dans les Ages sombres, sans en garder les meilleurs éléments ; une idolâtrie de textes hébreux morts, remplis de visions et de symboles, sans qu’aucun Daniel ne soit là pour en interpréter les rêves ; un brutal déferlement de luxe et de vanité dissimulé par un vulgaire hurlement évangéliste ; un ramassis de voleurs et de pillards, une poignée de lunatiques paradant à leur tête, radotant et écumant, en guise de mascottes porte-bonheur ; le retour du manichéisme, cette singerie hirsute de l’ascèse, conspirant avec le diable à la destruction du monde [c’est la phrase la plus importante, elle reprend une thèse de G. K. dans un autre texte, je vous cite ça à l’occasion] ; si d’aventure je disais cela, je conviendrais que ces remarques à propos du protestantisme ont une tournure légèrement provocante. Mais dussé-je déclarer, avec M. Belloc, que le protestantisme fut le naufrage de la Chrétienté, je considérerais qu’il s’agit là d’une vérité historique élémentaire, tout comme si je disais que la guerre d’Indépendance américaine causa une fracture dans l’Empire britannique. La nuance entre ces deux types de propos dépasse les capacités de discernement du bigot sectaire, qu’ils sortent de notre bouche ou de la sienne propre."

De façon comparable, si vous parlez du Grand Remplacement, on vous traitera de provocateur - et de mythomane. Si vous citez à l’appui de vos idées des rapports de l’UE demandant plus d’immigration en Europe, vous êtes un provocateur - et un salaud. Si vous dites en revanche que l’Europe a besoin de sang neuf et d’immigration, que l’immigration massive est une chance pour elle, alors vous n’êtes plus dans la provocation, vous voilà miraculeusement revenu dans le domaine des faits ! - H. Belloc aurait dû écrire que le protestantisme avait renouvelé la Chrétienté à un moment où celle-ci en avait besoin, et on ne l’aurait pas accusé de provocation…


(Tristesse par ailleurs d’avoir fini Pourquoi je suis catholique. Mais nous n’avons pas fini d’en parler !)

jeudi 28 mars 2019

"Cette religiosité qui est une sorte de préjugé inconscient…"

Quelques mises au point de Chesterton, toujours aussi utiles et actuelles : 

"En ce qui me concerne, je suis entièrement favorable à la propagande, et une bonne partie de mes écrits est délibérément propagandiste. Mais même quand mon travail n’est en aucune façon propagandiste, il est probablement rempli des implications découlant de ma propre religion, car c’est ce qu’on entend précisément par le fait d’avoir une religion. Ainsi les plaisanteries d’un bouddhiste, s’il y en avait, seraient des plaisanteries bouddhistes. De même, à supposer qu’un méthodiste-calviniste jubilerait en chants d’amour, il jubilerait en chants d’amour méthodistes-calvinistes. Les catholiques ont de leur côté produit plus de blagues et de chants d’amour que les calvinistes et les bouddhistes. En effet, conservant une sacro-sainte façade, les calvinistes et les bouddhistes n’ont pas obtenu de religion si large et si humaine. Mais, de toutes manières, leurs propos seraient systématiquement imprégnés de leurs convictions ; c’est du bon sens qui semble évident par lui-même, bien que je prévoie déjà toutes les difficultés qui surgiront à ce sujet dans le cas unique et isolé de l’Église catholique. 

Pour mettre les choses au point, ce que je viens de dire serait vrai de toute religion qui en est vraiment une, seulement une bonne partie du monde moderne déborde de cette religiosité qui est plutôt une sorte de préjugé inconscient. Le bouddhisme est effectivement une religion, ou en en tout cas il est vraiment une philosophie. Le calvinisme était vraiment une religion, effectivement dotée d’une théologie. Mais l’esprit de l’homme moderne est un mélange curieux de calvinisme décomposé et de bouddhisme dilué, et il exprime sa propre philosophie sans même savoir qu’il en a une. Nous [les catholiques], nous disons ce qu’il nous est naturel de dire, mais nous savons ce que nous affirmons, c’est pourquoi on présume que nous le disons pour produire de l’effet. L’homme moderne dit ce qu’il lui est naturel de dire, mais il ne sait pas ce qu’il affirme, encore moins pourquoi il l’affirme. Alors on ne l’accuse pas de proférer des dogmes dans le but de les révéler au monde, car il ne les a pas vraiment révélés à lui-même. Il est tout autant un partisan, tout autant un particulariste, il dépend tout autant d’un système doctrinal particulier, distinct des autres. Mais il a pris si souvent ses dogmes pour accordés qu’il a oublié ce qu’ils étaient. Alors sa littérature ne lui paraît pas partisane, même lorsqu’elle l’est effectivement. Mais notre littérature lui paraît systématiquement propagandiste, même quand elle ne l’est pas. (…)

[L’homme moderne] dépend vraiment de ces deux dogmes, qu’il n’ose nullement remettre en question et que par ailleurs il est incapable d’énoncer. Ces dogmes sont les suivants : premièrement, l’humanité s’améliore systématiquement au cours du temps ; et deuxièmement, cette amélioration consiste dans une indifférence toujours plus grande à l’égard du phénomène miraculeux. Aucune de ces deux affirmations ne peut être prouvée. Et il va sans dire que celui qui les implique ne peut les prouver, car il ne peut même pas les énoncer. Mais dans la mesure où ces affirmations font partie des choses sujettes à démonstration, il est possible d’en démontrer la fausseté. Car il y eut certainement des périodes historiques de rechute et de retour en arrière, et il y a certainement des civilisations très organisées, portées sur la science, qui sont très excitées concernant le surnaturel, un peu comme les gens le sont aujourd’hui au sujet du spiritisme. Mais de toutes façons il faut au préalable accepter ces dogmes sur parole d’autorité, comme absolument vrais… (…) 

La seule différence [entre l’homme moderne et moi], c’est que je peux défendre mon dogme, alors que lui ne peut même pas définir le sien. 

Autrement dit, le monde contemporain ignore complètement que tous les romans et les journaux qu’il lit ou écrit [ou les séries Netflix !, note de AMG] sont en fait remplis de suppositions précises, qui s’avèrent en fait aussi dogmatiques que les dogmes. Je suis d’accord avec certaines de ces suppositions, comme l’idéal de l’égalité humaine, sous-entendu dans toutes les histoires romantiques depuis Cendrillon jusqu’à Oliver Twist, ou la vérité que les riches offensent Dieu en méprisant la pauvreté. Avec quelques-unes d’entre elles je ne suis pas du tout d’accord (…). Le problème vient de ce que toutes ces suppositions, vraies ou fausses, soient ressenties comme supposées d’avance, comme ce à quoi on fait nécessairement allusion, ou tout simplement comment ce qu’on prend tout naturellement comme ça vient. On ne les ressent pas comme si elles étaient prêchées et c’est pourquoi on ne les traite pas de propagande. Pourtant, dans la pratique, elles ont le double caractère de la propagande : elles impliquent des points de vue avec lesquels tout le monde n’est pas d’accord, et elles répandent ces points de vue par des moyens de fiction et de la littérature populaire." 

Et des séries Netflix…

mercredi 27 mars 2019

"La croissance de l’État et celle du marché sont intimement liées..."

Dans le dernier numéro d’Éléments je retrouve, sous la plume de Guillaume Travers ("Les dangers d’une « société sans cash »") une idée qui m’est chère et que j’ai encore exprimée il y a quelque temps. La voir dans un article par ailleurs intéressant m’encourage à enfoncer le clou : 

"La croissance des États centralisés s’est opérée - d’abord sous l’absolutisme, puis avec la Révolution - par la destruction systématique [des] modes d’organisation intermédiaires, non monétaires, informels. La raison en est simple : pour pouvoir croître et lever des ressources fiscales, les États avaient besoin que les échanges soient formalisés, donc marchands. Tout ce qui demeurait non marchand échappait à l’impôt. Ainsi, la croissance de l’État et celle du marché sont intimement liées, et ont toutes deux contribué à faire disparaître les interactions communautaires et les structures intermédiaires qui avaient jusque-là joué un rôle prépondérant."

L’État moderne et le marché ont besoin tous deux de fluidité, d’homogénéité, de circulation. Tout ce qui est de l’ordre du particularisme, de la rupture, spatiale, temporelle, mentale, culturelle, est vécu par ces forces convergentes comme un obstacle. Le besoin de lever l’impôt est ici à la fois cause et effet, plus que simplement cause. Mais nous revenons à ce thème : libéralisme et État moderne sont apparus ensemble et l’un grâce (ou à cause…) de l’autre. 



Je dois par ailleurs chipoter M. Travers sur un point, parce qu’il commet une erreur, ou une approximation, trop répandue, en donnant, quelques lignes avant ce passage, une mauvaise interprétation de la structure maussienne du don/contre-don : je ne sais pas s’il exista une seule société dans laquelle les échanges auraient été fondés uniquement ou même principalement sur cette structure. Elle a toujours coexisté avec d’autres, c’est d’ailleurs toujours le cas actuellement. Ce que Mauss met à jour n’est pas tant un mode d’échange concurrent du mode d’échange marchand et/ou étouffé par lui (même si bien sûr l’échange marchand vient rogner son domaine d’application), qu'une façon d’échanger, codifiée (plus ou moins explicitement) et agonistique, que l’on retrouve selon lui, à côté d’autres, dans toutes les sociétés humaines. - Au surplus, je ne vois pas trop comment pourrait fonctionner une société où l’on devrait rendre à chaque fois plus que ce que l’on vous a donné, cela donnerait une espèce de suicide collectif et masochiste… qui pour le coup évoque plutôt notre « civilisation » !

mardi 26 mars 2019

"Autant d’ignorance avec si peu d’indifférence..."

Quelques remarques sagaces de Chesterton sur la perception que beaucoup de gens ont de l’Église. Ni lui ni moi ne prétendons que l’histoire ou le présent de celle-ci sont sans tache, cela ne change rien aux constats de G. K. : 

"Ils en racontent tellement à son sujet et en même temps ils en disent si peu. Ils en voient une si grande partie et ils en voient si peu. Il y a une sorte de contradiction colossale, concevable uniquement entre différentes dimensions ou différents plans de réflexion, dans la coexistence d’un fait aussi familier avec une vérité si complètement inconnue. En réalité, il n’y a qu’une seule combinaison de mots que je connaisse, qui ait jamais vraiment exprimé de manière exacte un paradoxe humain et historique aussi énorme, et ces mots sont aussi familiers qu’insondables : « La lumière a brillé dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont point comprise. [Jean, 1, 5.] »

Une part de la difficulté est sans doute due à la manière étrange dont tant de gens sont préoccupés par l’Église catholique tout en ayant des préjugés contre elle. Il est curieux d’observer autant d’ignorance avec si peu d’indifférence. Ils aiment en parler et ils détestent en entendre parler. (…)

Ils ne seraient pas si ignorants à son sujet s’ils n’avaient pas décidé qu’elle était morte. Ils ne seraient pas si irrités à son sujet s’ils n’avaient pas découvert qu’elle était vivante."

Dans un autre texte : 

"Ce qui manque dans toutes ces choses c’est la chose évidente, c’est la question de la comparaison entre l’Église et le monde extérieur, ou opposé, ou substitué à l’Église. Et c’est un fait évident que le monde fera toujours tout ce dont il a pu accuser l’Église ; il le fera d’une manière pire et sur une échelle bien plus grande, et il le fera (ce qui est le pire et le plus important de tout) sans aucun critère de retour à la normale et sans aucune raison de se repentir. Les abus catholiques peuvent être corrigés parce que le catholicisme admet des principes régulateurs. Les péchés catholiques peuvent être expiés, parce qu’il y a un examen de conscience et un principe d’expiation. Mais où ailleurs dans le monde d’aujourd’hui peut-on trouver un examen ou un critère pareil, ou quelque chose d’autre qui ne soit pas qu’une humeur passagère ? [C’est dans ce vide que l’Islam s’engouffre, bien évidement, et il aurait tort de se priver, note de AMG.] (…)

Il n’y a pas une seule des fautes alléguées contre l’Institution catholique qui ne se retrouve bien plus flagrante, et même flamboyante, dans toutes les autres institutions. Et c’est vers ces autres institutions que sont l’État, l’école, l’appareil moderne d’impôts et les dispositifs de surveillance que les gens se tournent, pour se préserver des « superstitions » de leurs ancêtres. Voilà la contradiction, voilà l’écrasante collision, voici l’inévitable désastre intellectuel dans lequel ils sont empêtrés !"


Tout ceci écrit il y a plus de 80 ans, il y a presque un siècle…

lundi 25 mars 2019

Une vidéo pour citation.



Tout cela est très intéressant - hélas… 

J’ajouterai à ce que dit Mme Pivet à la fin de cette vidéo, la remarque suivante : 

 - si, comme elle le soutient, le corps sexué, déconnecté par l’idéologie du genre de tout le reste de l’identité, est ce sur quoi jeunes garçons et jeunes filles se rabattent, parce que finalement c’est tout ce qui leur reste de concret sur quoi s’appuyer en une période qui veut si fortement dissocier nature et culture (en détruisant les deux), 

(il ne faut pas hésiter ici à naviguer conceptuellement entre Lénine - "l'éternel retour du concret" - et M. Foucault, eh oui, le corps comme affirmation politique...)

  - si donc cela aboutit, comme le dit Esther Pivet, à ce que jeunes garçons et jeunes filles survalorisent ostensiblement leurs caractères sexuels les plus primaires et évidents - ce que l’on observe effectivement assez régulièrement dans la vie quotidienne -, 

alors cela renforce les idéologues du genre dans leur combat : en 2019, les stéréotypes persistent, malgré tous nos efforts ! Il faut donc en faire encore plus ! Le patriarcat n’est donc pas mort ! Etc. C’est le même état d’esprit qu’à l’UE (il faut plus d’Europe pour que les gens finissent par comprendre que l’Europe est mieux que tout), le même état d’esprit que sous les régimes communistes, qui n’étaient jamais assez communistes. Et il faut lutter plus encore contre l’islamophobie, que des attentats soient commis par ou contre des musulmans…

Sur ce dernier exemple ceci dit, si j’ai déjà souligné souvent ici les rapports paradoxaux entre théorie du genre (qui nie le corps sexué) et des aspects de la théologie sexuelle musulmane (qui absolutise le corps sexué), il faut reconnaître par contre que les musulmans et les islamistes, quand ils ne jouent pas les faux culs sur l’islamophobie, ne tombent pas dans ce travers et cette perversité : ils demandent, plus ou moins gentiment et poliment, aux chiens d’infidèles, de se convertir à ce qu’il estiment être la seule vraie religion. On peut discuter de ce dernier point, on peut discuter des moyens employés, mais la logique d’ensemble en tout cas est claire et franche.  


A demain, si Dieu le veut ! 

dimanche 24 mars 2019

Berdiaeff et le transhumanisme…

Berdiaeff, oui, cela faisait longtemps : 

"Les utopies apparaissent comme bien plus réalisables qu’on ne le croyait autrefois. Et nous nous trouvons actuellement devant une question angoissante : comment éviter leur réalisation définitive ? Les utopies sont réalisables. La vie marche vers les utopies. Et peut-être un siècle nouveau commence-t-il, un siècle où les intellectuels et la classe cultivée rêveront au moyen d’éviter les utopies et de retourner à une société non utopique, moins « parfaite » - et plus libre."


Les intellectuels, oui, certains d’entre eux ; mais les Gilets Jaunes (et compagnons de route) sont sans doute moins utopistes en 2019 que beaucoup de membres de la classe dite cultivée. - Amusant ceci étant de voir à quel point ces lignes disent, sous une autre forme, la même chose qu’un constat de Günther Anders que je citais souvent au début de ce blog : le vrai progressiste maintenant est celui qui veut conserver, qui a compris que c’est la première, logiquement et chronologiquement, chose à faire. Les améliorations nécessaires ne pouvant venir qu’après la conservation, vue la violence du mouvement d’ensemble vers la destruction de tout. Le marxiste juif et le chrétien russe plutôt blanc tombaient d’accord… et, il n'est jamais trop tard pour bien faire, 80 ans après, le bon peuple français les suit !

samedi 23 mars 2019

"La main de tous les misérables s’abattra sur lui." Bon acte XIX !

"Ses os regorgeaient de jeunesse, 
mais elle couchera avec lui dans la poussière. 
Puisque le mal est si doux à sa bouche, qu’il l’abrite sous sa langue, 
le savoure sans le lâcher
et le retient encore dans son palais, 
son aliment se corrompt dans ses entrailles
et y devient un venin d’aspic.
La fortune qu’il avait avalée, la voilà vomie : 
à son ventre, Dieu la fera rejeter. 
C’est un venin d’aspic qu’il suçait, 
la langue de la vipère le tuera. 
Il ne verra plus les ruisseaux, les fleuves, les torrents de miel et de crème. 

Il rend ce qu’il a gagné et ne peut l’avaler, 
quoi que lui aient rapporté ses échanges, il n’en jouira pas.

Puisqu’il a écrasé et délaissé les pauvres, 
qu’il a volé une maison au lieu de la bâtir, 
puisque son ventre n’a pas su se contenter, 
il ne sauvera aucun de ses trésors. 
Rien n’échappe à sa voracité, 
aussi son bonheur ne durera pas. 
Au comble de l’abondance, la détresse va le saisir, 
la main de tous les misérables s’abattra sur lui."


Job, 20, 11-23. 

vendredi 22 mars 2019

"Le dernier mot du réalisme."

Je découvre cette savoureuse description du tableau de Courbet, L’origine du monde - je ne le reproduis pas, cf. ci-après - par Maxime Du Camp : 

"Lorsqu’on écartait le voile, on demeurait stupéfait d’apercevoir une femme de grandeur naturelle, vue de face, émue et convulsée, remarquablement peinte, reproduite con amore, ainsi que disent les Italiens, et donnant le dernier mot du réalisme. Mais, par un inconcevable oubli, l’artisan, qui avait copié son modèle d’après nature, avait négligé de représenter les pieds, les jambes, les cuisses, le ventre, les hanches, la poitrine, les mains, les bras, les épaules, le cou et la tête."


Con amore, je substitue à ce tableau, certes à plus d’un titre remarquable mais qui à force d’être reproduit (cela agaçait déjà Muray il y a des années) ressemble de plus en plus à un insert de film porno - figure de style cinématographique que Courbet invente en cette fin XIXe, quelque temps avant que les Lumière n'inventent le cinéma... -, cette émouvante photographie d’une des grandes Ève du XXe siècle, qui me paraît être le bon contrepoint autant à l’oeuvre du communard Courbet qu’à la pertinente description qu’en dresse l'anti-communard (subtiles allusions aux GiletsJaunes !) Du Camp. 



jeudi 21 mars 2019

Allez, Étienne, bientôt royaliste !

"Le citoyen est actif et responsable quand l’électeur est passif et irresponsable. On sait depuis Platon que la pire des choses qui puisse arriver à une cité, c’est de se placer sous le pouvoir d’hommes désireux de le prendre ; or c’est précisément ce que fait l’élection : donner le pouvoir à ceux qui le veulent et qui de ce fait sont les pires. Le tirage au sort, lui, en désignant n’importe lequel d’entre nous, ne va pas systématiquement sélectionner les pires, il limite au contraire ce risque."

Étienne Chouard, dans le dernier numéro d’Éléments. C’est presque du Maurras ou du Boutang, il suffit de compléter, et cela répondra à une objection souvent soulevée contre le RIC, la possibilité d’un bordel permanent : avec un roi, qui s’il n’a objectivement pas été tiré au sort, l’est subjectivement (dès qu’il est conscient, on lui apprend qu’il a une mission, lui et pas ses petits camarades, et qu’il n’a pas le choix, ça tombe sur sa gueule et pas celle du voisin), un roi garantie de permanence et qui lui-même n’a pas demandé à être là, on complète le dispositif. - Je sais bien qu’une des raisons de la longévité de la monarchie française relève du rôle qu’y ont joué les nombreux corps intermédiaires, mais cela ne change pas le raisonnement : pour que le peuple puisse décider, il faut, afin d'éviter la dérive vers la chienlit, en regard du peuple une constance, une permanence (vous remarquerez que j’emploie des termes liés à la durée, et pas à un espace marqué socialement, genre dominés-dominants, lutte des classes, gueux, etc.) ; et si cette constance ne provient pas, comme ce serait sans doute le cas dans la France de 2019, de la constance d’arrivistes à protéger leur quant-à-soi, c’est tout de même mieux. 


C’était l’utopie anarcho-conseilliste-monarchiste du jour… 

mercredi 20 mars 2019

"La situation était surtout intolérable par l’idée qu’elle deviendrait pire."

Flaubert. - Cela décrit clairement me semble-t-il cet entre-deux dans lequel nous vivons depuis des années, bien que « entre-deux » ne soit pas nécessairement, justement, le bon terme, tant nous avons le sentiment qu'à plus ou moins long terme, le pire est sûr. Et c'est un sentiment qui vous a des côtés de prophétie auto-réalisatrice...

mardi 19 mars 2019

Interdit d'interdire mon cul.

J'aime bien je l'avoue le slogan de 68 "Interdit d'interdire", peut-être parce qu'on peut l'interpréter dans une direction plus lucide qu'utopiste... Quoi qu'il en soit des intentions de son auteur, il faut cinquante ans après, le reformuler : "Interdit de ne pas interdire", telle semble être la devise des nouveaux gouvernants. (D'un certain point de vue, c'est la même chose, mais en pire.)

J'ai écrit hier sur Twitter : "Les gens du gouvernement, j'emploie à dessein une expression laide, n'ont que deux façons d'agir : créer des impôts, inventer de nouveaux règlements." Il aurait fallu écrire, et on me le fait remarquer à juste titre : inventer de nouvelles interdictions. - On connaît la formule de Clemenceau : "Quand je veux enterrer un problème, je crée une commission." Macron et compagnie, tous ces gens qui veulent diriger le réel avant de penser à le regarder, le comprendre et à s’y adapter, sont dans le registre : "Quand je rencontre un problème, je crée une interdiction et/ou un impôt." Direct ou indirect pour l’impôt, mais le mouvement des Gilets Jaunes est là pour montrer que beaucoup de Français ne voient pas dans cette nuance matière à se calmer. 


Le problème bien sûr à terme, en tout cas à court terme, étant que, si telle est leur seule façon d’appréhender des difficultés politiques, plus la révolte continuera, et plus ils attaqueront nos libertés. Ce qui bien sûr ne veut pas dire qu’il faille les laisser gouverner comme ils l’entendent…

lundi 18 mars 2019

"I did not have sexual relations with that woman." L'absurde, c'est maintenant.

"Je ne connais pas cette théorie du grand remplacement." - Marine Le Pen, c'est la connerie, le déshonneur et la défaite.

dimanche 17 mars 2019

Le négationnisme, c’est maintenant.

J’ironisais mercredi dernier sur l’emploi du mot « supposé » dans un entretien avec un historien-flic, je le retrouve au début de cet article consacré à Renaud Camus (https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/03/15/la-theorie-du-grand-remplacement-de-l-ecrivain-renaud-camus-aux-attentats-en-nouvelle-zelande_5436843_4355770.html). Je ne l’ai pas encore lu en entier (Les mains sales et La nausée, comme disait Desproges dans un autre contexte), mais le début est déjà un chef-d’oeuvre de perversité et, restons sartriens, de mauvaise foi. Et comme de juste, on y trouve du « supposé » à toutes les sauces : 


"L’écrivain d’extrême droite Renaud Camus n’est pas homme à se morfondre dans la mauvaise conscience. Peu lui importe que, pour justifier son attentat sanglant, l’un des terroristes qui ont fait au moins 49 morts dans une double attaque contre des mosquées en Nouvelle-Zélande se soit réclamé du concept de « grand remplacement » qu’il a forgé. Sur Twitter, M. Camus se contente de rappeler qu’il condamne la violence, et estime n’avoir aucune responsabilité dans le passage à l’acte de Brenton Tarrant.

« Le grand remplacement » est pourtant inscrit en grandes lettres sur la première page du manifeste publié en ligne par l’Australien de 28 ans, juste avant d’entrer dans des mosquées pour y ouvrir le feu sur les personnes présentes. Tout au long des 74 pages de ce texte décousu, Brenton Tarrant se désole d’une supposée invasion du monde occidental par les « non-Européens ».

Il affirme que le désespoir de voir Emmanuel Macron – un « internationaliste, globaliste, anti-Blanc », supposément favorable à une immigration « massive » – battre en 2017 la « quasi nationaliste » Marine Le Pen a été, dit-il, l’un des éléments déclencheurs de sa folie meurtrière. De même que la vision, lors d’un séjour en France, d’un pays où « les envahisseurs sont partout » l’aurait convaincu de la nécessité de passer à l’acte.

Un discours qui colle parfaitement, si l’on met de côté la violence, avec la théorie du « grand remplacement » mise au point il y a une dizaine d’années par Renaud Camus, qui a depuis essaimé dans le débat politique français et au-delà de nos frontières."

J’adore ce "Si l’on met de côté la violence…" Si l’on met de côté les seins et le vagin (entre autres), une femme est un homme, après tout ! Cela me rappelle un superbe texte de Jean Madiran, que je vous ai déjà cité ici, où il ironisait sur un article du Monde aussi je crois, dans lequel les adversaires politiques que furent Maritain et Maurras étaient assimilés l’un à l’autre (et à l’extrême-droite), "avec toutes les différences que l’on voudra"… Une fois que l’on est pareil, on peut être différent, tout est dans tout et réciproquement. 

Ceci étant, si une tuerie de masse telle que celle de Christchurch est bien de la dernière débilité à tous les niveaux, il ne serait pas inopportun tout de même de réfléchir à cette place accordée par son auteur à la France actuelle comme moteur de son action. Mais s’il fallait attendre des examens de conscience de la part de ceux qui nous foutent dans la merde, cela se saurait - et ils ne nous mettraient justement pas autant dans la merde. 


Bref : bon dimanche !